Dans son Journal consacré à ses activités de gestionnaire des Menus Plaisirs, Jean-Denis Papillon de la Ferté répond à M. de Moras doutant que les spectacles soient, d’une quelconque manière, utiles au roi : « Pour tout réponse je lui citai Colbert qui pensait au contraire qu’il fallait à la Cour des spectacles capables d’exciter la curiosité des étrangers, & d’occasionner par là une circulation & une consommation avantageuses à l’Etat. (JMPR, p. 8-9). » Cet argument est avancé une nouvelle fois à l’occasion de la rédaction de mémoires consacrés à un projet de fusion entre la Comédie-Italienne et l’Opéra-comique : « Il est vrai que je cherchais à démontrer la nécessité de soutenir les bons spectacles, non seulement pour l’honneur de la nation & l’amusement du public, mais encore relativement aux vues politiques de l’Etat, comme un des principaux moyens d’attirer les étrangers & d’enrichir le royaume par une augmentation de circulation & de consommation très avantageuse pour les finances du Roi. (JMPR, p. 10) ».
Sous l’Ancien Régime, les divertissements et fêtes font partie intégrante de la politique tant intérieure qu’extérieure, participant de façon positive au développement économique du royaume en ce qu’ils stimulent le commerce (Versailles, en ce sens, regorge de consommateurs et la vie aulique ne manque pas de donner lieu à de nombreuses dépenses). La réalisation de spectacles de qualité (« bons spectacles ») s’accompagne, par ailleurs, de multiples commandes aux fournisseurs. Les dépenses liées aux spectacles augmentent de façon continue jusqu’au XVIIIe siècle, dépassant largement le million de livres tournois. Ils représentent 54% de la dépense totale des Menus Plaisirs en 1786 contre 44% en 1698. (1) La renommée et le rayonnement des spectacles est à même de susciter des phénomènes de mode pouvant dépasser les frontières du royaume et de promouvoir le goût et le style français en Europe, c’est-à-dire le génie français comme le soulignera Voltaire. La clientèle étrangère en apparaît le vecteur privilégié.
Les spectacles ne se limitent donc pas à de simples loisirs et amusements qui se voudraient emblématiques d’une politique culturelle particulière au sein du royaume. L’absolutisme se voit non seulement érigé en machine diplomatique (les spectacles visant à positionner la cour de France parmi les plus prestigieuses et puissantes d’Europe et à susciter émulation et imitation), mais aussi en mécanisme de mise en spectacle du pouvoir comme l’ont montré Norbert Elias et Jean-Marie Apostolidès (2). Dès le XVIIe siècle, Louis XIV fait des spectacles un système élaboré de représentation symbolique du corps imaginaire du roi dont il est le principal organisateur (il en est ainsi « le machiniste »), et dont le but est à la fois d’attirer la cour et la retenir à Versailles. selon Frédérique Leferme-Falguières, « les divertissements ne sont pas des loisirs libres, mais une obligation quotidienne (3) ». L’instauration de spectacles participe également d’une volonté de contrôler la noblesse.
Cette organisation régulière de spectacles invite à s’interroger d’une part sur le rôle exact des Menus Plaisirs dans la réalisation à la fois du spectaculaire scénique et du théâtral social de Louis XIV à Louis XVI, et d’autre part à la manière dont l’abondance et le faste, symbole du pouvoir royal (4), sont mis en scène afin d’impressionner le public. Quelles sont les formes de l’illusion et que traduisent-elles en termes d’image du pouvoir et d’économie de la mise en scène ?
1. Les Menus Plaisirs à l’œuvre (rôle)
2. Mise en scène du pouvoir et pouvoir d’illusion de la mise en scène de Louis XIV à Louis XVI (les grandes réalisations)
Sous l’Ancien Régime, les divertissements et fêtes font partie intégrante de la politique tant intérieure qu’extérieure, participant de façon positive au développement économique du royaume en ce qu’ils stimulent le commerce (Versailles, en ce sens, regorge de consommateurs et la vie aulique ne manque pas de donner lieu à de nombreuses dépenses). La réalisation de spectacles de qualité (« bons spectacles ») s’accompagne, par ailleurs, de multiples commandes aux fournisseurs. Les dépenses liées aux spectacles augmentent de façon continue jusqu’au XVIIIe siècle, dépassant largement le million de livres tournois. Ils représentent 54% de la dépense totale des Menus Plaisirs en 1786 contre 44% en 1698. (1) La renommée et le rayonnement des spectacles est à même de susciter des phénomènes de mode pouvant dépasser les frontières du royaume et de promouvoir le goût et le style français en Europe, c’est-à-dire le génie français comme le soulignera Voltaire. La clientèle étrangère en apparaît le vecteur privilégié.
Les spectacles ne se limitent donc pas à de simples loisirs et amusements qui se voudraient emblématiques d’une politique culturelle particulière au sein du royaume. L’absolutisme se voit non seulement érigé en machine diplomatique (les spectacles visant à positionner la cour de France parmi les plus prestigieuses et puissantes d’Europe et à susciter émulation et imitation), mais aussi en mécanisme de mise en spectacle du pouvoir comme l’ont montré Norbert Elias et Jean-Marie Apostolidès (2). Dès le XVIIe siècle, Louis XIV fait des spectacles un système élaboré de représentation symbolique du corps imaginaire du roi dont il est le principal organisateur (il en est ainsi « le machiniste »), et dont le but est à la fois d’attirer la cour et la retenir à Versailles. selon Frédérique Leferme-Falguières, « les divertissements ne sont pas des loisirs libres, mais une obligation quotidienne (3) ». L’instauration de spectacles participe également d’une volonté de contrôler la noblesse.
Cette organisation régulière de spectacles invite à s’interroger d’une part sur le rôle exact des Menus Plaisirs dans la réalisation à la fois du spectaculaire scénique et du théâtral social de Louis XIV à Louis XVI, et d’autre part à la manière dont l’abondance et le faste, symbole du pouvoir royal (4), sont mis en scène afin d’impressionner le public. Quelles sont les formes de l’illusion et que traduisent-elles en termes d’image du pouvoir et d’économie de la mise en scène ?
1. Les Menus Plaisirs à l’œuvre (rôle)
2. Mise en scène du pouvoir et pouvoir d’illusion de la mise en scène de Louis XIV à Louis XVI (les grandes réalisations)
Les Menus Plaisirs à l’œuvre
Les Menus-plaisirs, administration polyvalente au service des affaires de l’État, étaient rattachés à la Chambre du Roi, département qui avait pour vocation d’animer la vie de la Cour par des divertissements. Comme l’a suggéré Pauline Lemaigre-Gaffier, cette administration « se trouvait à un carrefour institutionnel, à la croisée des échanges entre le roi et ses sujets, entre la Cour et de la Ville. Artisans majeurs du spectacle monarchique, les Menus s’impliquaient à toute échelle dans son organisation matérielle : leurs compétences ressortissaient à l’extraordinaire et au quotidien, au profane et au sacré. C’est pourquoi ils se chargeaient aussi bien de la mise en scène des grands rituels d’État que de l’organisation des fêtes de cour, en passant par celle des ‘comédies et concerts’ qui scandaient la vie des courtisans ». (5)
Les Menus faisaient référence à tous les objets de la vie courante (coffres, lits, dais, cassettes, portraits, bijoux, almanachs, calendriers (6). Les Plaisirs comprenaient tout ce qui était en rapport avec les spectacles autrement dit avec l’agrément. Ils se distinguaient par leur hétéroclisme : fêtes de cour, bals, feux d’artifice, scénographie (décors, costumes, machinerie), entretien des salles de spectacles, administration des théâtres parisiens. Sous Louis XIV, le développement de l’opéra, géré par la ville de Paris, fut souvent lié à cette administration quand bien même le nombre d’opéras produits à la cour serait moindre que celui des pièces de théâtre. A la fin du XVIIIe siècle, l’Académie royale de musique, fortement endettée, sera d’ailleurs placée sous la tutelle des Menus Plaisirs en 1780. Les trois grands spectacles de la capitale seront ainsi définitivement contrôlés par la Maison du Roi. Dès le XVIIe siècle les Menus Plaisirs avaient en effet sous leur tutelle la Comédie-Française (fondée en 1680) et le théâtre italien qui deviendra par la suite la Comédie-Italienne (7). La Dauphine, Marie-Christine Victoire de Bavière à qui la surintendance de la Comédie-Française revint, exerça son pouvoir (ou plutôt son humeur) sur la troupe dès les années 1680, règlementant celle-ci et patronnant certains acteurs, tout en déléguant ses responsabilités aux Gentilshommes de la Chambre, notamment au duc d’Aumont (8).
Au XVIIIe siècle, les spectacles étaient administrés par ces derniers, les plus célèbres étant les ducs D’Aumont, de Duras, de Fleury et le Maréchal de Richelieu pour la période allant de 1758 à 1782 (9), chacun étant de service tour à tour. A ces premiers gentilshommes était subordonné l’Intendant (la charge fut créée au XVIIe siècle, le 28 juin 1627 plus exactement), qui gérait également le personnel des Plaisirs (10). Marie-Antoinette tendit de plus en plus, après 1780 à organiser et diriger elle-même les Menus Plaisirs. L’Intendant dépendait hiérarchiquement, de l’Intendant des Finances auquel il devait rendre des comptes (d’où les multiples mémoires rédigés au cours de ces 24 années), cependant qu’il s’avérait difficile de faire fi des directives et orientations des gentilshommes de la Chambre en matière de programmation qui, bien souvent, obéissaient à la logique du goût plutôt qu’à celle du bon sens (11).
Le règne du roi soleil s’accompagna tout d’abord par des festivités éblouissantes se distinguant par leur variété : une première collation était généralement suivie de spectacles, d’un bal et de feux d’artifices. Il s’agit des premières fêtes galantes où les courtisans participaient eux-mêmes à la mise en spectacle du pouvoir royal. Ponctuelles, elles étaient données en plein air dans le parc Versailles, décor naturel de verdure se mariant élégamment et avec raffinement aux constructions éphémères construites pour l’occasion – et au théâtre du grand monde (12). Elles étaient d’une durée limitée, d’un ou de quelques jours, les trois plus importantes et célèbres étant « Les Plaisirs de l’Ile Enchantée », 1664 (quatre jours consécutifs) ; « Le Grand Divertissement royal », 1668 (une journée) ; « Les Divertissements de Versailles », 1674 (six jours). La programmation de ces divertissements incombait aux Menus Plaisirs : l’éclectisme et la prolixité y était recherchée (carrousels, courses de bague et de têtes, ballets, loterie, promenades en gondole, illuminations etc.) ; les phénomènes de mode y étaient également respectés. Ainsi les formes musicales demeurèrent très en vogue du XVIIe siècle au XVIIIe siècle, tout d’abord avec les comédies-ballets de Molière et la tragédie lyrique de Lully, puis, au siècle suivant avec l’opéra-comique et l’opéra. Papillon de la Ferté notait par exemple à la fin des années 1750, que les sujets de l’opéra furent chargés de représenter des opéras comiques à la cour, genre très apprécié du public à la ville, afin de les faire découvrir à la famille royale – qui apprécia d’ailleurs ce nouveau type de spectacles.
Les Menus faisaient référence à tous les objets de la vie courante (coffres, lits, dais, cassettes, portraits, bijoux, almanachs, calendriers (6). Les Plaisirs comprenaient tout ce qui était en rapport avec les spectacles autrement dit avec l’agrément. Ils se distinguaient par leur hétéroclisme : fêtes de cour, bals, feux d’artifice, scénographie (décors, costumes, machinerie), entretien des salles de spectacles, administration des théâtres parisiens. Sous Louis XIV, le développement de l’opéra, géré par la ville de Paris, fut souvent lié à cette administration quand bien même le nombre d’opéras produits à la cour serait moindre que celui des pièces de théâtre. A la fin du XVIIIe siècle, l’Académie royale de musique, fortement endettée, sera d’ailleurs placée sous la tutelle des Menus Plaisirs en 1780. Les trois grands spectacles de la capitale seront ainsi définitivement contrôlés par la Maison du Roi. Dès le XVIIe siècle les Menus Plaisirs avaient en effet sous leur tutelle la Comédie-Française (fondée en 1680) et le théâtre italien qui deviendra par la suite la Comédie-Italienne (7). La Dauphine, Marie-Christine Victoire de Bavière à qui la surintendance de la Comédie-Française revint, exerça son pouvoir (ou plutôt son humeur) sur la troupe dès les années 1680, règlementant celle-ci et patronnant certains acteurs, tout en déléguant ses responsabilités aux Gentilshommes de la Chambre, notamment au duc d’Aumont (8).
Au XVIIIe siècle, les spectacles étaient administrés par ces derniers, les plus célèbres étant les ducs D’Aumont, de Duras, de Fleury et le Maréchal de Richelieu pour la période allant de 1758 à 1782 (9), chacun étant de service tour à tour. A ces premiers gentilshommes était subordonné l’Intendant (la charge fut créée au XVIIe siècle, le 28 juin 1627 plus exactement), qui gérait également le personnel des Plaisirs (10). Marie-Antoinette tendit de plus en plus, après 1780 à organiser et diriger elle-même les Menus Plaisirs. L’Intendant dépendait hiérarchiquement, de l’Intendant des Finances auquel il devait rendre des comptes (d’où les multiples mémoires rédigés au cours de ces 24 années), cependant qu’il s’avérait difficile de faire fi des directives et orientations des gentilshommes de la Chambre en matière de programmation qui, bien souvent, obéissaient à la logique du goût plutôt qu’à celle du bon sens (11).
Le règne du roi soleil s’accompagna tout d’abord par des festivités éblouissantes se distinguant par leur variété : une première collation était généralement suivie de spectacles, d’un bal et de feux d’artifices. Il s’agit des premières fêtes galantes où les courtisans participaient eux-mêmes à la mise en spectacle du pouvoir royal. Ponctuelles, elles étaient données en plein air dans le parc Versailles, décor naturel de verdure se mariant élégamment et avec raffinement aux constructions éphémères construites pour l’occasion – et au théâtre du grand monde (12). Elles étaient d’une durée limitée, d’un ou de quelques jours, les trois plus importantes et célèbres étant « Les Plaisirs de l’Ile Enchantée », 1664 (quatre jours consécutifs) ; « Le Grand Divertissement royal », 1668 (une journée) ; « Les Divertissements de Versailles », 1674 (six jours). La programmation de ces divertissements incombait aux Menus Plaisirs : l’éclectisme et la prolixité y était recherchée (carrousels, courses de bague et de têtes, ballets, loterie, promenades en gondole, illuminations etc.) ; les phénomènes de mode y étaient également respectés. Ainsi les formes musicales demeurèrent très en vogue du XVIIe siècle au XVIIIe siècle, tout d’abord avec les comédies-ballets de Molière et la tragédie lyrique de Lully, puis, au siècle suivant avec l’opéra-comique et l’opéra. Papillon de la Ferté notait par exemple à la fin des années 1750, que les sujets de l’opéra furent chargés de représenter des opéras comiques à la cour, genre très apprécié du public à la ville, afin de les faire découvrir à la famille royale – qui apprécia d’ailleurs ce nouveau type de spectacles.
De nombreuses pièces furent créées à la cour au XVIIe siècle (comme par exemple Le Bourgeois gentilhomme de Molière, ou Iphigénie de Jean Racine). Cependant les Menus Plaisirs avaient un rôle de relais entre la ville et la cour. Ils étaient au centre de la création, développant leurs propres productions, étant porteurs d’innovation, notamment en matière scénographique comme nous allons le voir. Par ailleurs, ils concouraient à établir et ancrer une tradition dramatique en élaborant, à travers la programmation régulière ou systématique de certaines pièces tirées des répertoires des théâtres privilégiés qu’ils administraient, un patrimoine dramatique, tout en important, à la cour, les nouveautés jouées à Paris. Ainsi de la popularité d’Arlequin à la cour ou de nouveaux genres comme l’opéra-comique comportant danse, musique, chant et scènes parlées, emblématique même de l’hétéroclisme propre à l’idée de mascarade et de fête nés du style rocaille comme l’ont montré François Moureau et Sylvie Requemora Gros (13). Les Menus Plaisirs faisaient autant preuve d’ingéniosité que d’inventivité. En effet, ils transmettaient autant qu’ils faisaient découvrir. Ils promouvaient des formes théâtrales existantes tout en les agrégeant au système de représentation politique voulu et inauguré par Louis XIV, qu’ils renouvelaient dès lors de façon continue à travers les reprises et de nouvelles mises en scène, cumulant les fonctions d’administrateurs et de régisseurs des spectacles.
Les divertissements furent, avec l’aide de Colbert, institutionnalisés. Les spectacles furent en effet progressivement intégrés au quotidien de la cour et programmés de façon régulière : la cour s’installa de façon permanente à Versailles en 1682 et se sédentarisa. Elle se déplaçait néanmoins régulièrement, se rendant généralement à Fontainebleau, moins souvent à Marly (sous Louis XIV), et à Choisy (sous Louis XV (14). Marie-Antoinette eut quant à elle son propre théâtre et des représentations furent données à Trianon. Les divertissements débutaient à l’automne à Fontainebleau (théâtre de l’aile de la Belle Cheminée permettant des mises en scène spectaculaires) durant six semaines, et se poursuivaient à Versailles jusqu’au carême (ils se tenaient le plus souvent dans la Cour des Princes, espace exigu). (15) Le théâtre occupait désormais une place privilégiée qui ne fit que se renforcer jusqu’au règne de Louis XVI (on donna ainsi en 1777, quatre-vingt-treize spectacles, dont quarante-huit de la Comédie-Française et vingt-quatre de la Comédie-Italienne). (16) Ils n’étaient suspendus qu’en cas de deuil.
La fin du règne de Louis XIV accentua l’idée de cérémonial dans les faits et gestes quotidiens, mais aussi les plaisirs journaliers. Au-delà des festivités liées à un événement particulier (mariage, célébration de la paix, ou naissance), les spectacles prirent une autre dimension, moins grandiose certes, mais non moins importante. Ils exercèrent une fonction curiale : ils s’ancraient désormais dans la vie aulique, faisant partie d’un véritable rituel auquel personne ne pouvait se soustraire. Les plaisirs s’articulaient autour de trois activités majeures, qui furent, au XVIIe siècle, fixées à un jour de la semaine bien précis : le jeu ou « soirées appartement », les spectacles à proprement parler (théâtre français, italien, ballets et opéra), trois fois par semaine, et la danse ou bals. Tout comme les sociétaires des principaux théâtres parisiens préparaient un répertoire quinzenier privilégiant l’alternance (composé de pièces dites du « trottoir », c’est-à-dire du répertoire courant, et de pièces nouvelles (17), les Menus Plaisirs furent chargés sous Louis XIV d’élaborer un répertoire hebdomadaire rythmant les soirées des nobles. Frédérique Leferme Falguières en donne un exemple précis établi à partir des mémoires du Duc de Dangeau (18) :
Les divertissements furent, avec l’aide de Colbert, institutionnalisés. Les spectacles furent en effet progressivement intégrés au quotidien de la cour et programmés de façon régulière : la cour s’installa de façon permanente à Versailles en 1682 et se sédentarisa. Elle se déplaçait néanmoins régulièrement, se rendant généralement à Fontainebleau, moins souvent à Marly (sous Louis XIV), et à Choisy (sous Louis XV (14). Marie-Antoinette eut quant à elle son propre théâtre et des représentations furent données à Trianon. Les divertissements débutaient à l’automne à Fontainebleau (théâtre de l’aile de la Belle Cheminée permettant des mises en scène spectaculaires) durant six semaines, et se poursuivaient à Versailles jusqu’au carême (ils se tenaient le plus souvent dans la Cour des Princes, espace exigu). (15) Le théâtre occupait désormais une place privilégiée qui ne fit que se renforcer jusqu’au règne de Louis XVI (on donna ainsi en 1777, quatre-vingt-treize spectacles, dont quarante-huit de la Comédie-Française et vingt-quatre de la Comédie-Italienne). (16) Ils n’étaient suspendus qu’en cas de deuil.
La fin du règne de Louis XIV accentua l’idée de cérémonial dans les faits et gestes quotidiens, mais aussi les plaisirs journaliers. Au-delà des festivités liées à un événement particulier (mariage, célébration de la paix, ou naissance), les spectacles prirent une autre dimension, moins grandiose certes, mais non moins importante. Ils exercèrent une fonction curiale : ils s’ancraient désormais dans la vie aulique, faisant partie d’un véritable rituel auquel personne ne pouvait se soustraire. Les plaisirs s’articulaient autour de trois activités majeures, qui furent, au XVIIe siècle, fixées à un jour de la semaine bien précis : le jeu ou « soirées appartement », les spectacles à proprement parler (théâtre français, italien, ballets et opéra), trois fois par semaine, et la danse ou bals. Tout comme les sociétaires des principaux théâtres parisiens préparaient un répertoire quinzenier privilégiant l’alternance (composé de pièces dites du « trottoir », c’est-à-dire du répertoire courant, et de pièces nouvelles (17), les Menus Plaisirs furent chargés sous Louis XIV d’élaborer un répertoire hebdomadaire rythmant les soirées des nobles. Frédérique Leferme Falguières en donne un exemple précis établi à partir des mémoires du Duc de Dangeau (18) :
Les spectacles au XVIIIe siècle se multiplièrent, alternant tous les deux ou trois jours, proposant parfois aux spectateurs plusieurs pièces un même jour (et rejoignant en cela la programmation de la ville, la Comédie-Française représentant chaque soir une grande et une petite pièce). Tous les genres y avaient leur place, y compris les spectacles de marionnettes. En ce qui concerne le théâtre français, l’offre se fondait essentiellement sur un répertoire désormais classique (Molière et Racine, Corneille également) mais aussi plus récent qui intégrait les pièces à succès des décennies précédentes (Voltaire par exemple), les Menus Plaisirs devant composer avec le propre répertoire de la Comédie-Française. Des recueils furent publiés retraçant le calendrier des représentations et adjoignant à ce dernier, les pièces de théâtre. On peut ainsi voir la programmation suivante en 1770 puis en 1783 :
Au XVIIIe siècle, la programmation devint plus ardue, le répertoire des théâtres parisiens s’accroissant et se complexifiant (pièces usées, pièces à la mode, pièces du répertoire courant, pièces à remettre au goût du jour etc.). Peu de pièces nouvelles furent inaugurées à la cour. On tendit de plus en plus à présenter des œuvres qui avaient fait leurs preuves à la ville et qui, le cas échéant, avaient été retravaillées immédiatement par l’auteur et la troupe en fonction de la réaction du public parisien. Cette stratégie permit une meilleure sélection en termes de programmation (amélioration qualitative) et une préparation plus soutenue des spectacles (au niveau des répétitions et de la mémorisation du texte à jouer par exemple). Elle permit, en outre, de mieux se concentrer sur la logistique. Désormais, la Comédie-Française donnait des comédies à la cour le mardi et le jeudi des tragédies, et la Comédie-Italienne le mercredi et vendredi en 1737, puis le samedi en 1743 à Fontainebleau (20). Les changements de dernière minute n’étaient pas rares comme en témoigne La Ferté (les Premiers Gentilshommes de la Chambre fixent en effet le répertoire et validaient la distribution des rôles), surtout en ce qui concerne les spectacles de Fontainebleau :
J’ai reçu avant-hier, de nouveaux ordres de M. le duc de Duras relatifs au répertoire de Fontainebleau, avec des changements de spectacle, qui exigent une augmentation considérable d’habits. Cela est désolant, car il faudra faire passer toutes les nuits aux ouvriers, ce qui augmentera d’autant la dépense. Je n’ai pu m’empêcher d’en faire mes représentations à M. de Duras, ainsi que sur la fatigue continuelle & la perte de temps que m’occasionnent toutes ces variations. Mais à cela on m’a répondu que le Roi est bien le maître d’avoir les spectacles qu’il désire. Je le sais & rien n’est plus juste, si c’est, en effet le Roi qui demande ces changements; mais je n’en crois rien & je commence à avoir assez d’usage de la Cour, pour savoir que l’on fait souvent dire au Roi des choses auxquelles il n’a pas pensé une minute. (JMPR, p. 59)
La difficulté à arrêter un répertoire, les ordres et les contre-ordres successifs des Premiers Gentilshommes, se faisant en fonction de leur humeur (21) du moment (en particulier lorsque le maréchal de Richelieu était d’année), les caprices des vedettes du temps (danseurs et acteurs en particulier) posaient de véritables problèmes d’organisation. Le 28 janvier 1765, La Ferté, contrarié à plusieurs reprises remarquait ainsi : « M. le Maréchal ayant demandé Amour pour amour avec des divertissements, il a fallu, en moins de trois jours, préparer des décorations en conséquence, faire vingt-quatre habits neufs, préparer les états des sujets, les billets de voiture, etc. Ce spectacle a eu lieu, mercredi 23, avec trois divertissements. Le Roi y est venu » (JMPR, p. 82). Le personnel impliqué dans la fabrication des spectacles (« jusqu’à cent cinquante tailleurs, couturières et ouvriers pour la mise au point des costumes des spectacles ordinaires, sans compter plusieurs dizaines de menuisiers-machinistes et de manœuvres ») (22) était mis à rude épreuve (23).
L’engouement de la cour pour les formes musicales comme l’opéra, nécessitant d’importants moyens, et l’opéra-comique, de même que la théâtromanie et le goût pour « le tableau », amenèrent les Menus Plaisirs à privilégier les productions spectaculaires visant à éblouir le public, tant par les costumes que par les décors, et par le nombre de figurants ou danseurs.
J’ai reçu avant-hier, de nouveaux ordres de M. le duc de Duras relatifs au répertoire de Fontainebleau, avec des changements de spectacle, qui exigent une augmentation considérable d’habits. Cela est désolant, car il faudra faire passer toutes les nuits aux ouvriers, ce qui augmentera d’autant la dépense. Je n’ai pu m’empêcher d’en faire mes représentations à M. de Duras, ainsi que sur la fatigue continuelle & la perte de temps que m’occasionnent toutes ces variations. Mais à cela on m’a répondu que le Roi est bien le maître d’avoir les spectacles qu’il désire. Je le sais & rien n’est plus juste, si c’est, en effet le Roi qui demande ces changements; mais je n’en crois rien & je commence à avoir assez d’usage de la Cour, pour savoir que l’on fait souvent dire au Roi des choses auxquelles il n’a pas pensé une minute. (JMPR, p. 59)
La difficulté à arrêter un répertoire, les ordres et les contre-ordres successifs des Premiers Gentilshommes, se faisant en fonction de leur humeur (21) du moment (en particulier lorsque le maréchal de Richelieu était d’année), les caprices des vedettes du temps (danseurs et acteurs en particulier) posaient de véritables problèmes d’organisation. Le 28 janvier 1765, La Ferté, contrarié à plusieurs reprises remarquait ainsi : « M. le Maréchal ayant demandé Amour pour amour avec des divertissements, il a fallu, en moins de trois jours, préparer des décorations en conséquence, faire vingt-quatre habits neufs, préparer les états des sujets, les billets de voiture, etc. Ce spectacle a eu lieu, mercredi 23, avec trois divertissements. Le Roi y est venu » (JMPR, p. 82). Le personnel impliqué dans la fabrication des spectacles (« jusqu’à cent cinquante tailleurs, couturières et ouvriers pour la mise au point des costumes des spectacles ordinaires, sans compter plusieurs dizaines de menuisiers-machinistes et de manœuvres ») (22) était mis à rude épreuve (23).
L’engouement de la cour pour les formes musicales comme l’opéra, nécessitant d’importants moyens, et l’opéra-comique, de même que la théâtromanie et le goût pour « le tableau », amenèrent les Menus Plaisirs à privilégier les productions spectaculaires visant à éblouir le public, tant par les costumes que par les décors, et par le nombre de figurants ou danseurs.
Notes
(1) Pauline Lemaigre-Gaffier, « Les Menus Plaisirs, gestionnaires de la vie théâtrale des Lumières », Le Développement du grand spectacle, 1715-1874, dir. S. Chaouche et R. Martin, European Drama and Performance Studies, 1, Paris, Éditions classiques Garnier, 2013.
Tableau récapitulatif des dépenses des Menus Plaisirs pour les spectacles au XVIIIe siècle
a) Année
b) Dépenses pour les spectacles, en livres tournois
c) Dépenses pour les spectacles, en marcs d’or
d) Part des spectacles dans la dépense totale des Menus Plaisirs
1698 ----- 30 645 ----- 60 ----- 44 %
1744 ----- 154 944 ----- 209 ----- 33 %
1762 ----- 489 484 ----- 661 ----- 28 %
1786 ----- 1 391 870 ----- 1880 ----- 54 %
(2) Norbert Elias, La Société de cour, Paris, Gallimard, 1974 ; Jean-Marie Apostolidès, Le Roi Machine, Spectacle et politique au temps de Louis XIV, Paris, Minuit, 1981.
(3) Voir Frédérique Leferme-Falguières, Les Courtisans. Une société de spectacle sous l’Ancien Régime, Paris, PUF, 2006 p. 256.
(4) Leferme-Falguières, op. cit., p. 263-264.
(5) Pauline Lemaigre-Gaffier, article cité.
(6) Papillon de la Ferté est souvent chargé de commander des présents pour les actrices (ex: portrait du roi pour Mlle Dangeville ou Clairon, p. 21; tabatière offerte à une actrice en guise de récompense pour ses débuts etc..) ou de préparer les corbeilles des futures mariées d’objets rafinés. Ainsi Marie-Antoinette reçoit pour son mariage une ‘magnifique parure’ selon ls mots de Papillon de la Ferté, composée d’une montre d’émail bleu avec sa chaîne tout en diamant, un étui de côté avec sa chaîne, une tabatière, un éventail, ‘le tout de la plus grande richesse’ (JMPR, p. 182).
(7) Louis XIV ordonna cependant la fermeture de l’Hôtel de Bourgogne en 1696, suite, vraisemblablement, aux provocations de la troupe, Mme de Maintenon étant tournée en ridicule dans La Fausse Prude ; la troupe italienne sera à nouveau bienvenue en 1715, au début de la Régence.
(8) André Blanc, F.C. Dancourt, 1661-1725: la Comédie française à l'heure du soleil couchant, Tübingen : Narr [etc] ; Paris : Éditions Place, 1984, p. 27-28.
(9) Le Journal de La Ferté couvre la période 1756 -1780
(10) On voit ainsi à maintes reprises Papillon de la Ferté évoquer la rétribution d’employés travaillant à l’occasion d’événéments exceptionnels (mariage et sacre de Louis XVI par exemple) mais aussi le salaire habituel des comédiens, musiciens, danseurs, machinistes et divers ouvriers. Les frais de déplacements sont aussi inclus dans cette gestion des spectacles.
L’un des plus célèbres intendants fut Jean-Denis Papillon de la Ferté, un homme qui avait l’expérience du monde des spectacles et qui joua à la fois un rôle de gestionnaire et de « producteur ». Son célèbre Journal débute en 1756, moment où on le charge d’administrer la Comédie Italienne criblée de dettes (500 000 livres) et que l’on est prêt à fermer, et se termine en 1780, époque où les charges d’Intendant sont supprimées et remplacées par celles de Commissaire (cinq en tout). Ce n’est qu’au moment de la Révolution qu’il perdit sa charge (de 1785 à 1789 il fut même nommé Commissaire général).
‘MM. les Premiers Gentilshommes de la Chambre, désireux de voir rétablir l’ordre dans les spectacles, & connaissant par leur propre expérience que cela était impossible si les comédiens n’étaient pas surveillés, prirent le parti d’engager les Intendants des Menus, qui jusqu’ alors ne s’étaient mêlés que du détail des spectacles de la Cour, de se charger de suivre ceux de Paris.’ (p. 9) Lundi 31 janvier 1780. ‘Enfin il est paru ce fameux édit concernant la réforme de la Maison du Roi, la suppression des charges des Intendants, des Contrôleurs de la Bouche, des Ecuries du Roi et de la Reine, du Garde-meuble, des Menus. Ils sont remplacés par 5 commissaires’ (p. 315).
(11) 1763 – entrevue avec le Comte de Saint-Florentin. ‘Il m’a bien fait sentir que nous devions être plus aux ordres du ministre qu’à celui des Premiers Gentilshommes de la Chambre, dont nous avons été les contrôleurs et les contradicteurs. Il s’en faut bien que les choses soient ainsi aujourd’hui.’ 43
(12) Leferme-Falguières, op. cit., p. 256.
(13) François Moureau, Le Goût italien dans la France rocaille. Théâtre, musique, peinture (v. 1680-1750), Paris, PUPS, 2011; Sylvie Requemora, « Comment imaginer la fête comique ? Jean-François Regnard, théories festives et imagination dramaturgiques », Fête et imagination dans la littérature du XVIe au XVIIIe siècle, actes du colloque du centre de recherches aixois sur l’imagination de la Renaissance à l’Âge classique (Aix-en-Provence, 13-15 févr. 2003), éd. Huguette Krief et Sylvie Requemora. Aix-en-Provence, Publications de l’Université de Provence, 2004, p. 221-237.
(14) Noter que Louis XV ne s’installe à Versailles qu’en 1723.
(15) Théâtre de Cour. Les spectacles à Fontainebleau au XVIIIe siècle, catalogue de l’exposition au Musée national du château de Fontainebleau (18 octobre 2005-23 janvier 2006), Paris, éd. de la RMN, 2005 ; Vincent Pruchnicki, « Un théâtre au château de Versailles : la comédie de la cour des Princes », Bulletin du Centre de recherche du château de Versailles, 2009, http://www.crcv.revues.org/10139
(16) Journal de Papillon de la Ferté, ed. Er,est Boysse, Paris, Ollendorff, 1887, introduction, p. 28.
(17) Sabine Chaouche, La Mise en scène du répertoire à la Comédie-Française, 1680-1815, Paris, Champion, 2013, première partie.
(18) Leferme Falguières, op. cit., p. 257.
(19) « M. le Duc d’Aumont, qui n’avait pu réunir dans les Fêtes du Mariage tous les différents Spectacles de la Capitale, saisit le moment du premier voyage de Madame la Dauphine à Choisy, pour lui donner des Spectacles, formés seulement par les Sujets de la Comédie-Italienne » (Recueil des fêtes et spectacles données devant sa Majesté, à Versailles, à Choisy et à Fontainebleau pendant l’année 1770, Paris, Ballard, 1770, vol. 1, « Journal des spectacles de cour pendant l’année 1770 ».
(20) Leferme Falguières, op. cit., p. 258.
(21) Journal de Papillon de la Ferté, op. cit., p. 85 (10 octobre 1762).
(22) Lemaigre-Gaffier, op. cit. [1762 (AN, O1 3006), 1771 (AN, O1 3032) et 1786 (AN, O1 3073 et 3074)]. « La variété de ces derniers fait écho à la diversité des métiers mobilisés : atelier des tailleurs, des brodeurs et des « coiffures de théâtre », atelier des peintres et magasin des couleurs, atelier des menuisiers, des sculpteurs et des ferblantiers répartis dans les trois bâtiments de l’hôtel . C’est là que l’on fait non seulement travailler les employés des Menus Plaisirs, mais aussi certains de leurs fournisseurs et des ouvriers engagés ponctuellement. »
(23) Journal de Papillon de la Ferté, op. cit., p. 82. Girault, machiniste.
Tableau récapitulatif des dépenses des Menus Plaisirs pour les spectacles au XVIIIe siècle
a) Année
b) Dépenses pour les spectacles, en livres tournois
c) Dépenses pour les spectacles, en marcs d’or
d) Part des spectacles dans la dépense totale des Menus Plaisirs
1698 ----- 30 645 ----- 60 ----- 44 %
1744 ----- 154 944 ----- 209 ----- 33 %
1762 ----- 489 484 ----- 661 ----- 28 %
1786 ----- 1 391 870 ----- 1880 ----- 54 %
(2) Norbert Elias, La Société de cour, Paris, Gallimard, 1974 ; Jean-Marie Apostolidès, Le Roi Machine, Spectacle et politique au temps de Louis XIV, Paris, Minuit, 1981.
(3) Voir Frédérique Leferme-Falguières, Les Courtisans. Une société de spectacle sous l’Ancien Régime, Paris, PUF, 2006 p. 256.
(4) Leferme-Falguières, op. cit., p. 263-264.
(5) Pauline Lemaigre-Gaffier, article cité.
(6) Papillon de la Ferté est souvent chargé de commander des présents pour les actrices (ex: portrait du roi pour Mlle Dangeville ou Clairon, p. 21; tabatière offerte à une actrice en guise de récompense pour ses débuts etc..) ou de préparer les corbeilles des futures mariées d’objets rafinés. Ainsi Marie-Antoinette reçoit pour son mariage une ‘magnifique parure’ selon ls mots de Papillon de la Ferté, composée d’une montre d’émail bleu avec sa chaîne tout en diamant, un étui de côté avec sa chaîne, une tabatière, un éventail, ‘le tout de la plus grande richesse’ (JMPR, p. 182).
(7) Louis XIV ordonna cependant la fermeture de l’Hôtel de Bourgogne en 1696, suite, vraisemblablement, aux provocations de la troupe, Mme de Maintenon étant tournée en ridicule dans La Fausse Prude ; la troupe italienne sera à nouveau bienvenue en 1715, au début de la Régence.
(8) André Blanc, F.C. Dancourt, 1661-1725: la Comédie française à l'heure du soleil couchant, Tübingen : Narr [etc] ; Paris : Éditions Place, 1984, p. 27-28.
(9) Le Journal de La Ferté couvre la période 1756 -1780
(10) On voit ainsi à maintes reprises Papillon de la Ferté évoquer la rétribution d’employés travaillant à l’occasion d’événéments exceptionnels (mariage et sacre de Louis XVI par exemple) mais aussi le salaire habituel des comédiens, musiciens, danseurs, machinistes et divers ouvriers. Les frais de déplacements sont aussi inclus dans cette gestion des spectacles.
L’un des plus célèbres intendants fut Jean-Denis Papillon de la Ferté, un homme qui avait l’expérience du monde des spectacles et qui joua à la fois un rôle de gestionnaire et de « producteur ». Son célèbre Journal débute en 1756, moment où on le charge d’administrer la Comédie Italienne criblée de dettes (500 000 livres) et que l’on est prêt à fermer, et se termine en 1780, époque où les charges d’Intendant sont supprimées et remplacées par celles de Commissaire (cinq en tout). Ce n’est qu’au moment de la Révolution qu’il perdit sa charge (de 1785 à 1789 il fut même nommé Commissaire général).
‘MM. les Premiers Gentilshommes de la Chambre, désireux de voir rétablir l’ordre dans les spectacles, & connaissant par leur propre expérience que cela était impossible si les comédiens n’étaient pas surveillés, prirent le parti d’engager les Intendants des Menus, qui jusqu’ alors ne s’étaient mêlés que du détail des spectacles de la Cour, de se charger de suivre ceux de Paris.’ (p. 9) Lundi 31 janvier 1780. ‘Enfin il est paru ce fameux édit concernant la réforme de la Maison du Roi, la suppression des charges des Intendants, des Contrôleurs de la Bouche, des Ecuries du Roi et de la Reine, du Garde-meuble, des Menus. Ils sont remplacés par 5 commissaires’ (p. 315).
(11) 1763 – entrevue avec le Comte de Saint-Florentin. ‘Il m’a bien fait sentir que nous devions être plus aux ordres du ministre qu’à celui des Premiers Gentilshommes de la Chambre, dont nous avons été les contrôleurs et les contradicteurs. Il s’en faut bien que les choses soient ainsi aujourd’hui.’ 43
(12) Leferme-Falguières, op. cit., p. 256.
(13) François Moureau, Le Goût italien dans la France rocaille. Théâtre, musique, peinture (v. 1680-1750), Paris, PUPS, 2011; Sylvie Requemora, « Comment imaginer la fête comique ? Jean-François Regnard, théories festives et imagination dramaturgiques », Fête et imagination dans la littérature du XVIe au XVIIIe siècle, actes du colloque du centre de recherches aixois sur l’imagination de la Renaissance à l’Âge classique (Aix-en-Provence, 13-15 févr. 2003), éd. Huguette Krief et Sylvie Requemora. Aix-en-Provence, Publications de l’Université de Provence, 2004, p. 221-237.
(14) Noter que Louis XV ne s’installe à Versailles qu’en 1723.
(15) Théâtre de Cour. Les spectacles à Fontainebleau au XVIIIe siècle, catalogue de l’exposition au Musée national du château de Fontainebleau (18 octobre 2005-23 janvier 2006), Paris, éd. de la RMN, 2005 ; Vincent Pruchnicki, « Un théâtre au château de Versailles : la comédie de la cour des Princes », Bulletin du Centre de recherche du château de Versailles, 2009, http://www.crcv.revues.org/10139
(16) Journal de Papillon de la Ferté, ed. Er,est Boysse, Paris, Ollendorff, 1887, introduction, p. 28.
(17) Sabine Chaouche, La Mise en scène du répertoire à la Comédie-Française, 1680-1815, Paris, Champion, 2013, première partie.
(18) Leferme Falguières, op. cit., p. 257.
(19) « M. le Duc d’Aumont, qui n’avait pu réunir dans les Fêtes du Mariage tous les différents Spectacles de la Capitale, saisit le moment du premier voyage de Madame la Dauphine à Choisy, pour lui donner des Spectacles, formés seulement par les Sujets de la Comédie-Italienne » (Recueil des fêtes et spectacles données devant sa Majesté, à Versailles, à Choisy et à Fontainebleau pendant l’année 1770, Paris, Ballard, 1770, vol. 1, « Journal des spectacles de cour pendant l’année 1770 ».
(20) Leferme Falguières, op. cit., p. 258.
(21) Journal de Papillon de la Ferté, op. cit., p. 85 (10 octobre 1762).
(22) Lemaigre-Gaffier, op. cit. [1762 (AN, O1 3006), 1771 (AN, O1 3032) et 1786 (AN, O1 3073 et 3074)]. « La variété de ces derniers fait écho à la diversité des métiers mobilisés : atelier des tailleurs, des brodeurs et des « coiffures de théâtre », atelier des peintres et magasin des couleurs, atelier des menuisiers, des sculpteurs et des ferblantiers répartis dans les trois bâtiments de l’hôtel . C’est là que l’on fait non seulement travailler les employés des Menus Plaisirs, mais aussi certains de leurs fournisseurs et des ouvriers engagés ponctuellement. »
(23) Journal de Papillon de la Ferté, op. cit., p. 82. Girault, machiniste.