2/ La Rhétorique
Son influence est incontestable à l’âge classique et au siècle des Lumières. Art du discours enseigné dans les Collèges, elle touche tous les domaines de la société.
La rhétorique apprend à l’orateur à savoir écrire mais aussi à savoir parler. Elle influence tous ceux qui déclament en public parce qu’elle est le seul art à donner des techniques oratoires précises (considérées comme canoniques parce que remontant Poème sur les mauvais gestesà l’Antiquité, époque pendant laquelle les plus brillants orateurs se sont illustrés). L’actio a été baptisée « l’éloquence du corps » (regroupant des préceptes sur la voix et le geste). Elle est l’une des cinq branches de la rhétorique (après l’inventio, l’elocutio, la dispositio, et avant la memoria) et en tant que telle, ne représente souvent qu’une partie des ouvrages portant sur celle-ci.
Il existe au XVIIe siècle quelques traités entièrement consacrés à l’actio comme les Vacationes autumnales sive de actio oratoris et gestu du Père de Cressolles (1620), le Traité de l’Action de l’Orateur, ou de la Prononciation & du Geste de Michel Le Faucheur (1657), Actio oratoris seu de gestu & voce du Père Lucas (1675), la Méthode pour bien prononcer un discours & le bien animer de René Bary (1679), le du Père Louis Sanlecque (1696).
On peut glaner aussi des informations dans tous les traités ayant pour sujet la prédication, voire le chant (comme par exemple l’ouvrage de Bacilly, Remarques curieuses sur l’art de bien chanter, 1674). Ils sont une mine de renseignements et donnent un aperçu des règles principales édictées par les rhétoriciens. Bien entendu les ouvrages de Cicéron (De l’orateur, L’Orateur) et de Quintilien (Institution oratoire), dont se sont servis ces auteurs, méritent eux aussi une scrupuleuse attention. Défricher le champ de l’actio c’est ainsi partir à la rencontre de la déclamation. Regrouper les règles générales, relever et catégoriser les préceptes récurrents, c’est reconstituer la formation de base du comédien.
La rhétorique apprend à l’orateur à savoir écrire mais aussi à savoir parler. Elle influence tous ceux qui déclament en public parce qu’elle est le seul art à donner des techniques oratoires précises (considérées comme canoniques parce que remontant Poème sur les mauvais gestesà l’Antiquité, époque pendant laquelle les plus brillants orateurs se sont illustrés). L’actio a été baptisée « l’éloquence du corps » (regroupant des préceptes sur la voix et le geste). Elle est l’une des cinq branches de la rhétorique (après l’inventio, l’elocutio, la dispositio, et avant la memoria) et en tant que telle, ne représente souvent qu’une partie des ouvrages portant sur celle-ci.
Il existe au XVIIe siècle quelques traités entièrement consacrés à l’actio comme les Vacationes autumnales sive de actio oratoris et gestu du Père de Cressolles (1620), le Traité de l’Action de l’Orateur, ou de la Prononciation & du Geste de Michel Le Faucheur (1657), Actio oratoris seu de gestu & voce du Père Lucas (1675), la Méthode pour bien prononcer un discours & le bien animer de René Bary (1679), le du Père Louis Sanlecque (1696).
On peut glaner aussi des informations dans tous les traités ayant pour sujet la prédication, voire le chant (comme par exemple l’ouvrage de Bacilly, Remarques curieuses sur l’art de bien chanter, 1674). Ils sont une mine de renseignements et donnent un aperçu des règles principales édictées par les rhétoriciens. Bien entendu les ouvrages de Cicéron (De l’orateur, L’Orateur) et de Quintilien (Institution oratoire), dont se sont servis ces auteurs, méritent eux aussi une scrupuleuse attention. Défricher le champ de l’actio c’est ainsi partir à la rencontre de la déclamation. Regrouper les règles générales, relever et catégoriser les préceptes récurrents, c’est reconstituer la formation de base du comédien.
Analyse:
Ce tableau montre comment animer le discours : l’énergie mise dans la parole est graduelle et traduit un mouvement d’amplification (métaphorique de l’animation – ou vie – du discours). Ainsi les premières paroles doivent être prononcées d’une manière neutre. Le récit qui suit l’introduction doit conserver une certaine modération. La description des faits se veut instructive, et de fait, doit être exposée clairement mais calmement. La confirmation quant à elle, vise à agir sur l’auditeur par une démonstration argumentaire : le raisonnement et la mise en œuvre de formes pathétiques requièrent une voix beaucoup plus forte, plus emphatique. La conclusion est un point d’orgue et en tant que tel nécessite feu de la part de l’orateur (à moins qu’il ne veuille attendrir son public, auquel cas, la voix doit revenir à plus de douceur – à un pathétique tendre en somme).
Cette conception du discours est à mettre en parallèle avec toute scène relevant du genre judiciaire (délibératif). Toute scène tragique constituée de débats politiques, opposant deux ou plusieurs points de vue différents, met forcément en scène des personnages dont les répliques répondront à cette composition quadripartite du discours, l’auteur de la pièce subissant, avant le comédien, l’influence de la rhétorique. Celle-ci envisage la parole comme une stricte reproduction du discours (une parole actualisée mais mimétique de l’écrit), d’où l’importance des codes oratoires, mais aussi de leur bonne application (l’adéquation entre forme vocale et fond étant gage de vraisemblance – donc d’illusion, et de persuasion).
Dire, lire, déclamer, c’est entrer dans une convention orale où le son est à la fois l’image du mot et du sens. Ainsi tout l’esprit de la rhétorique se retrouve dans cette formule facétieuse de M. Flatte-oreille dans Molière comédien : « comme les paroles sont aux pensées ce que le bouchon est au vin, c’est-à-dire qu’elles les annoncent & les font connaître, regardez tout ce qui sortira de ma bouche comme une estampe qui contient la véritable portraiture des sentiments de mon esprit... » (Lyon, Briasson, 1694, I.6). La déclamation est un discours intellectualisé, qui a la charge de faire impression sur l’auditeur : lui faire voir des images par la parole et par la forme que revêt cette parole, les lui imprimer dans l’esprit, les lui faire sentir (comprendre) avant de les lui faire ressentir (l’émotion est amenée grâce la mise en œuvre de règles oratoires destinées à agir graduellement).
Ce tableau montre comment animer le discours : l’énergie mise dans la parole est graduelle et traduit un mouvement d’amplification (métaphorique de l’animation – ou vie – du discours). Ainsi les premières paroles doivent être prononcées d’une manière neutre. Le récit qui suit l’introduction doit conserver une certaine modération. La description des faits se veut instructive, et de fait, doit être exposée clairement mais calmement. La confirmation quant à elle, vise à agir sur l’auditeur par une démonstration argumentaire : le raisonnement et la mise en œuvre de formes pathétiques requièrent une voix beaucoup plus forte, plus emphatique. La conclusion est un point d’orgue et en tant que tel nécessite feu de la part de l’orateur (à moins qu’il ne veuille attendrir son public, auquel cas, la voix doit revenir à plus de douceur – à un pathétique tendre en somme).
Cette conception du discours est à mettre en parallèle avec toute scène relevant du genre judiciaire (délibératif). Toute scène tragique constituée de débats politiques, opposant deux ou plusieurs points de vue différents, met forcément en scène des personnages dont les répliques répondront à cette composition quadripartite du discours, l’auteur de la pièce subissant, avant le comédien, l’influence de la rhétorique. Celle-ci envisage la parole comme une stricte reproduction du discours (une parole actualisée mais mimétique de l’écrit), d’où l’importance des codes oratoires, mais aussi de leur bonne application (l’adéquation entre forme vocale et fond étant gage de vraisemblance – donc d’illusion, et de persuasion).
Dire, lire, déclamer, c’est entrer dans une convention orale où le son est à la fois l’image du mot et du sens. Ainsi tout l’esprit de la rhétorique se retrouve dans cette formule facétieuse de M. Flatte-oreille dans Molière comédien : « comme les paroles sont aux pensées ce que le bouchon est au vin, c’est-à-dire qu’elles les annoncent & les font connaître, regardez tout ce qui sortira de ma bouche comme une estampe qui contient la véritable portraiture des sentiments de mon esprit... » (Lyon, Briasson, 1694, I.6). La déclamation est un discours intellectualisé, qui a la charge de faire impression sur l’auditeur : lui faire voir des images par la parole et par la forme que revêt cette parole, les lui imprimer dans l’esprit, les lui faire sentir (comprendre) avant de les lui faire ressentir (l’émotion est amenée grâce la mise en œuvre de règles oratoires destinées à agir graduellement).
Les passions ont été réduites en deux appétits majeurs : l’appétit concupiscible et l’appétit irascible (les deux grands pôles vers lesquels tend le discours). De même que la voix, le geste est lui aussi mis en tablature.
Analyse:
Les descriptions peuvent être très générales (degré de vivacité du geste, mouvement) ou concises (la passion est comme prise sur le vif, les poses figées). Elles ont trait à toutes les parties du corps et sont le fruit d’observations. On notera que certains gestes relèvent véritablement d’un code (par exemple le geste pour provoquer en duel). Les gestes symboliques sont donc mélangés aux gestes représentant un sentiment.
Tous ces gestes ne sont pas à prendre au pied de la lettre : certains gestes, bien que catalogués, sont désuets (par exemple se frapper la tête en signe de deuil, qui est un geste antique). Il faut ainsi être vigilant au possible fossé entre théories et pratiques, de même qu’il faut repérer les gestes qui ne pourraient pas être utilisés dans les deux genres (gestes spécifiques au comique comme par exemple se mordre les doigts ou grincer des dents – ce dernier geste pourrait néanmoins être utilisé dans les scènes de fureurs).
Les descriptions peuvent être très générales (degré de vivacité du geste, mouvement) ou concises (la passion est comme prise sur le vif, les poses figées). Elles ont trait à toutes les parties du corps et sont le fruit d’observations. On notera que certains gestes relèvent véritablement d’un code (par exemple le geste pour provoquer en duel). Les gestes symboliques sont donc mélangés aux gestes représentant un sentiment.
Tous ces gestes ne sont pas à prendre au pied de la lettre : certains gestes, bien que catalogués, sont désuets (par exemple se frapper la tête en signe de deuil, qui est un geste antique). Il faut ainsi être vigilant au possible fossé entre théories et pratiques, de même qu’il faut repérer les gestes qui ne pourraient pas être utilisés dans les deux genres (gestes spécifiques au comique comme par exemple se mordre les doigts ou grincer des dents – ce dernier geste pourrait néanmoins être utilisé dans les scènes de fureurs).
Rassembler les préceptes oratoires du temps est indispensable si l’on souhaite étudier la déclamation. On peut d’ailleurs trouver des survivances de ceux-ci dans des écrits tardifs sur l’art théâtral. Les Eléments de l’art du comédien rédigés par Dorfeuille (1798-1801) montrent clairement l’assimilation et la rappropriation des règles rhétoriques par l’acteur. On peut enfin consulter tous les ouvrages relatifs aux manifestations des passions de l’âme et même certains ouvrages de médecine (en particulier pour tout ce qui concerne les symptômes du mal d’amour).
Références :
- L’Art du comédien, Déclamation et jeu scénique en France à l’âge classique, 1629-1680, Paris, Champion, 2001, première partie consacrée à la mécanique de l’éloquence du corps.
- Sept Traités sur le jeu du comédien et autres textes. De l’action oratoire à l’art dramatique (1657-1750), collection Sources Classiques, Paris, Champion, 2001, partie I « L’influence de la doctrine classique », p. 24-260.
- Ecrits sur l’art théâtral. Acteurs (1753-1801). Les Eléments de l’art du comédien, Volume II, Paris, Champion, Collection l’Age des Lumières, cinquième cahier, chapitres « de l’exorde », « de la confirmation », « de la péroraison ».
Références :
- L’Art du comédien, Déclamation et jeu scénique en France à l’âge classique, 1629-1680, Paris, Champion, 2001, première partie consacrée à la mécanique de l’éloquence du corps.
- Sept Traités sur le jeu du comédien et autres textes. De l’action oratoire à l’art dramatique (1657-1750), collection Sources Classiques, Paris, Champion, 2001, partie I « L’influence de la doctrine classique », p. 24-260.
- Ecrits sur l’art théâtral. Acteurs (1753-1801). Les Eléments de l’art du comédien, Volume II, Paris, Champion, Collection l’Age des Lumières, cinquième cahier, chapitres « de l’exorde », « de la confirmation », « de la péroraison ».