L’histoire des arts du spectacle s’appuie sur des images (représentations d’acteurs, de scènes…) et plus largement sur des documents pouvant faire place à l’image (affiches, programmes, éditions illustrées de textes dramatiques, articles de presse avec illustrations ou photographies, caricatures, pochettes de « disques de théâtre », etc.). Ces images ont été étudiées en tant qu’elles pouvaient renseigner sur la représentation disparue et la fabrique des spectacles. Certaines d’entre elles sont même devenues quasiment mythiques à force d’être reproduites, de la miniature du martyre de sainte Apolline peinte par Fouquet à la photographie de Jean Vilar adoubant Gérard Philipe dans Le Cid, en passant par les gravures représentant Garrick transporté ou Lekain dans un véritable costume à l’antique.
Ce n’est pourtant pas sur le contenu de ces images ni sur la question de leur valeur documentaire que veut se pencher ce numéro de la revue European Drama and Performance Studies. Il se propose non l’étude de l’image en elle-même, et pour ce qu’elle représente, mais l’étude de ce qui n’est pas elle et qu’il est nécessaire de connaître avant même de la regarder et de s’interroger sur sa valeur et son sens, c’est-à-dire essentiellement l’étude de deux choses : le contexte dans lequel elle a été initialement produite et utilisée, l’ensemble auquel elle appartient et dont elle a été retirée pour devenir un élément du corpus des documents de l’histoire des arts du spectacle. Qu’apprend le spécialiste de l’histoire du théâtre en se détournant de la miniature du martyre de sainte Apolline pour regarder les autres miniatures du même livre d’heures ? Qu’apprend-il en se renseignant sur le commerce des gravures ou les conditions professionnelles du photographe de presse ?
Les articles seront des études de cas, et à ce titre pourront être brefs. Ils porteront sur les images du spectacle, sans limite nationale ou chronologique. Ils pourront proposer soit une synthèse à propos d’une série ou d’un type de documents, soit la documentation complète d’un document particulier (seront bienvenus les articles qui viseront à reprendre l’étude d’un document iconographique très connu dans l’histoire du théâtre mais qui n’a pas été jusqu’ici envisagé dans les perspectives décrites ci-dessus). On pourra éventuellement faire une place à l’image animée, c’est-à-dire au théâtre filmé ou au documentaire.
L’essentiel sera que les articles entrent dans la problématique définie, dans laquelle on peut distinguer les cinq axes suivants :
1. Contexte de production et usages sociaux de l’image.
Qui a produit l’image, pour quoi et pour qui ? Comment a-t-elle diffusé ? Pourquoi et par qui a-t-elle été conservée, collectionnée, reproduite ? Ainsi, les gravures représentant pour la première fois Arlequin auprès du comédien français Agnan ne se comprennent qu’une fois établi ce qu’il en est vraiment du Recueil Fossard.
2. Inscription de l’image dans l’ensemble documentaire auquel elle appartient.
Telle photographie de plateau devenue célèbre a d’abord été par exemple un élément d’une série de photographies du même spectacle, dont il convient de rappeler le commanditaire et l’usage (photo de documentation personnelle, photo-souvenir, photo « d’art », photo publicitaire…).
3. Inscription de l’image ou de la série d’images dans l’ensemble des documents sur les arts du spectacle qui en sont contemporains.
Comment se démarque par ses affiches tel théâtre par rapport à ses concurrents ? Existe-t-il un champ social différencié (par exemple théâtre privé/subventionné au XXe siècle) ? Quelle est l’originalité de tel graveur, de tel affichiste, de tel photographe en dehors même des modalités imposées par le commanditaire ?
4. Inscription du document représentant un aspect de la vie théâtrale dans une série plus large comprenant des documents « non théâtraux » de la même époque.
Cette inscription permet d’évaluer exactement la spécificité du document. Quelle spécificité par exemple de l’affiche théâtrale par rapport aux autres affiches qui en sont contemporaines ? de l’illustration du livre de théâtre par rapport à l’illustration d’autres livres à la même époque ? de la publicité utilisant depuis le XIXe siècle la célébrité d’un comédien ou d’une comédienne par rapport à d’autres publicité pour des produits équivalents? de l’allégorie des genres théâtraux dans les siècles anciens par rapport aux autres représentations allégoriques ? Y a-t-il des codes spécifiques pour le portrait d’acteur, pour la photo de scène, etc. ?
5. Effets de la réinscription de l’image dans le corpus des documents servant à constituer l’histoire des arts du spectacle.
Le moment où l’image devient document (voire image « canonique », et même « lieu de mémoire ») peut changer son usage et son sens même. Quand Nadar photographie la jeune Sarah Bernhardt vers 1860, il réalise un portrait de belle inconnue: ce n’est qu’après coup que la photo devient célèbre comme une image d’actrice et que la colonne tronquée à gauche de l’image prend une connotation théâtrale.
La reproduction d’images illustrant les articles devra être limitée au strict minimum (reproduction des seuls documents peu accessibles) pour des raisons matérielles (impossibilité sauf exception justifiée de reproduire des images non libres de droit dans la revue), mais aussi intellectuelles : la problématique choisie écarte l’étude de l’image en elle-même au profit de l’étude de sa documentation, et en cela d’un certain point de vue elle permet de s’arracher à la fascination de l’image et d’en dégager le « hors champ ».
Les propositions (titre, résumé de l’article d’environ 300 mots, notice bio-bibliographique) sont à envoyer avant le 15 septembre 2013.
Le texte définitif devra être remis avant le 31 mars 2014.
Le numéro de la revue sera publié au début de l’automne 2014.
Prière d’envoyer les propositions par courriel aux deux coordinateurs du numéro, Alice Folco et Jean-Yves Vialleton, (Traverses 19-21 / Rare, Université Stendhal-Grenoble 3) : alice.folco@u-grenoble3.fr et jean-yves.vialleton@u-grenoble3.fr
Ce n’est pourtant pas sur le contenu de ces images ni sur la question de leur valeur documentaire que veut se pencher ce numéro de la revue European Drama and Performance Studies. Il se propose non l’étude de l’image en elle-même, et pour ce qu’elle représente, mais l’étude de ce qui n’est pas elle et qu’il est nécessaire de connaître avant même de la regarder et de s’interroger sur sa valeur et son sens, c’est-à-dire essentiellement l’étude de deux choses : le contexte dans lequel elle a été initialement produite et utilisée, l’ensemble auquel elle appartient et dont elle a été retirée pour devenir un élément du corpus des documents de l’histoire des arts du spectacle. Qu’apprend le spécialiste de l’histoire du théâtre en se détournant de la miniature du martyre de sainte Apolline pour regarder les autres miniatures du même livre d’heures ? Qu’apprend-il en se renseignant sur le commerce des gravures ou les conditions professionnelles du photographe de presse ?
Les articles seront des études de cas, et à ce titre pourront être brefs. Ils porteront sur les images du spectacle, sans limite nationale ou chronologique. Ils pourront proposer soit une synthèse à propos d’une série ou d’un type de documents, soit la documentation complète d’un document particulier (seront bienvenus les articles qui viseront à reprendre l’étude d’un document iconographique très connu dans l’histoire du théâtre mais qui n’a pas été jusqu’ici envisagé dans les perspectives décrites ci-dessus). On pourra éventuellement faire une place à l’image animée, c’est-à-dire au théâtre filmé ou au documentaire.
L’essentiel sera que les articles entrent dans la problématique définie, dans laquelle on peut distinguer les cinq axes suivants :
1. Contexte de production et usages sociaux de l’image.
Qui a produit l’image, pour quoi et pour qui ? Comment a-t-elle diffusé ? Pourquoi et par qui a-t-elle été conservée, collectionnée, reproduite ? Ainsi, les gravures représentant pour la première fois Arlequin auprès du comédien français Agnan ne se comprennent qu’une fois établi ce qu’il en est vraiment du Recueil Fossard.
2. Inscription de l’image dans l’ensemble documentaire auquel elle appartient.
Telle photographie de plateau devenue célèbre a d’abord été par exemple un élément d’une série de photographies du même spectacle, dont il convient de rappeler le commanditaire et l’usage (photo de documentation personnelle, photo-souvenir, photo « d’art », photo publicitaire…).
3. Inscription de l’image ou de la série d’images dans l’ensemble des documents sur les arts du spectacle qui en sont contemporains.
Comment se démarque par ses affiches tel théâtre par rapport à ses concurrents ? Existe-t-il un champ social différencié (par exemple théâtre privé/subventionné au XXe siècle) ? Quelle est l’originalité de tel graveur, de tel affichiste, de tel photographe en dehors même des modalités imposées par le commanditaire ?
4. Inscription du document représentant un aspect de la vie théâtrale dans une série plus large comprenant des documents « non théâtraux » de la même époque.
Cette inscription permet d’évaluer exactement la spécificité du document. Quelle spécificité par exemple de l’affiche théâtrale par rapport aux autres affiches qui en sont contemporaines ? de l’illustration du livre de théâtre par rapport à l’illustration d’autres livres à la même époque ? de la publicité utilisant depuis le XIXe siècle la célébrité d’un comédien ou d’une comédienne par rapport à d’autres publicité pour des produits équivalents? de l’allégorie des genres théâtraux dans les siècles anciens par rapport aux autres représentations allégoriques ? Y a-t-il des codes spécifiques pour le portrait d’acteur, pour la photo de scène, etc. ?
5. Effets de la réinscription de l’image dans le corpus des documents servant à constituer l’histoire des arts du spectacle.
Le moment où l’image devient document (voire image « canonique », et même « lieu de mémoire ») peut changer son usage et son sens même. Quand Nadar photographie la jeune Sarah Bernhardt vers 1860, il réalise un portrait de belle inconnue: ce n’est qu’après coup que la photo devient célèbre comme une image d’actrice et que la colonne tronquée à gauche de l’image prend une connotation théâtrale.
La reproduction d’images illustrant les articles devra être limitée au strict minimum (reproduction des seuls documents peu accessibles) pour des raisons matérielles (impossibilité sauf exception justifiée de reproduire des images non libres de droit dans la revue), mais aussi intellectuelles : la problématique choisie écarte l’étude de l’image en elle-même au profit de l’étude de sa documentation, et en cela d’un certain point de vue elle permet de s’arracher à la fascination de l’image et d’en dégager le « hors champ ».
Les propositions (titre, résumé de l’article d’environ 300 mots, notice bio-bibliographique) sont à envoyer avant le 15 septembre 2013.
Le texte définitif devra être remis avant le 31 mars 2014.
Le numéro de la revue sera publié au début de l’automne 2014.
Prière d’envoyer les propositions par courriel aux deux coordinateurs du numéro, Alice Folco et Jean-Yves Vialleton, (Traverses 19-21 / Rare, Université Stendhal-Grenoble 3) : alice.folco@u-grenoble3.fr et jean-yves.vialleton@u-grenoble3.fr