La Muette de Portici (Masaniello- Michael Spyres) DR E. Carecchio (c) Opéra Comique
On ne peut que se louer de l’arrivée à l’Opéra comique de Jérôme Deschamps et de son équipe, puisqu’ils s’attachent à ressusciter le patrimoine de leur maison jusque dans ses recoins les plus (injustement) oubliés et qu’ils ont ainsi donné depuis cinq saisons de brillantes productions. On peut cependant se demander à quoi cela peut bien servir lorsque le spectacle donné, en l’espèce La Muette de Portici, est vraiment moche et trahit l’esprit de l’œuvre originale…
Passons sur la musique d’Auber, même si les interprètes n’étaient pas en grande forme : la partition est intéressante et propose quelques beaux morceaux, dont le fameux air « Amour sacré de la patrie » qui donna en 1830 le coup d’envoi de l’émeute de Bruxelles.
Mais si l’opéra est un art total, on ne peut pas passer sur la mise en scène : signée Emma Dante, elle est bête de tout en bout et perturbe même la compréhension du livret, surchargé, de Scribe qui n’avait vraiment pas besoin de ça (deux histoires d’amour sur fond de révolution populaire) !
Le premier acte est vide comme les crinolines des femmes, relevées sur des cages dorées du meilleur effet, autour de bas de couleurs criardes. Quant aux danseurs, costumés en braqueurs de banque cagoulés, ils s’agitent en compagnie de mannequins de la même farine dont on ne comprend absolument pas la nécessité narrative ou esthétique (au troisième acte, ils finissent nus, frappés d’une attaque de typhus plus probablement que dépouillés par la populace, mais on peine à comprendre). Le décor pour les pêcheurs est plus réussi, à coup de toiles tendues. Mais le palais est digne d’un Capriccio strausséen de parodie ou d’une boîte à musique de pacotille. Avec, à tous les actes, des portes baladeuses qui cachent la misère de la mise en scène et figurent un intérieur/extérieur difficile à suivre lorsqu’une ampoule nue descendant des cintres ne figure pas la masure du pêcheur (ou son jardin selon la position de ladite porte…).
Passons sur la musique d’Auber, même si les interprètes n’étaient pas en grande forme : la partition est intéressante et propose quelques beaux morceaux, dont le fameux air « Amour sacré de la patrie » qui donna en 1830 le coup d’envoi de l’émeute de Bruxelles.
Mais si l’opéra est un art total, on ne peut pas passer sur la mise en scène : signée Emma Dante, elle est bête de tout en bout et perturbe même la compréhension du livret, surchargé, de Scribe qui n’avait vraiment pas besoin de ça (deux histoires d’amour sur fond de révolution populaire) !
Le premier acte est vide comme les crinolines des femmes, relevées sur des cages dorées du meilleur effet, autour de bas de couleurs criardes. Quant aux danseurs, costumés en braqueurs de banque cagoulés, ils s’agitent en compagnie de mannequins de la même farine dont on ne comprend absolument pas la nécessité narrative ou esthétique (au troisième acte, ils finissent nus, frappés d’une attaque de typhus plus probablement que dépouillés par la populace, mais on peine à comprendre). Le décor pour les pêcheurs est plus réussi, à coup de toiles tendues. Mais le palais est digne d’un Capriccio strausséen de parodie ou d’une boîte à musique de pacotille. Avec, à tous les actes, des portes baladeuses qui cachent la misère de la mise en scène et figurent un intérieur/extérieur difficile à suivre lorsqu’une ampoule nue descendant des cintres ne figure pas la masure du pêcheur (ou son jardin selon la position de ladite porte…).
La Muette de Portici DR E.Carecchio (c) Opéra Comique
Les costumes sont au diapason : ridicules et laids. La pauvre Elvire (Eglise Gutiérrez) est engoncée dans une nuisette qui ressemble à un lustre avec toutes ses pendeloques ; Alphonse, son amant-époux, est presque grimé en travesti, yeux noircis au khôl, escarpins lamés en prime. Quant au malheureux Masaniello, non content d’être empoisonné par un de ses camarades conspirateurs, il finit le quatrième acte coiffé du lustre du palais : un vrai Mamamouchi !
Hélas, hélas ! Je suis restée, pour voir l’apothéose du cinquième acte, le « clou » de l’éruption du Vésuve, pour lequel, à l’époque des féeries romantiques les plus échevelées, La Muette est restée plus célèbre encore que pour son rôle-titre muet… Trois fois hélas ! Cela ressemblait à une dérision d’Indes galantes : pas de Vésuve, mais un escalier qui transforme finalement Fenella en madone inca, dorure en sus. Elle aurait mieux fait de se jeter dans le volcan en fureur, comme le livret le lui prescrivait en 1828…
Hélas, hélas ! Je suis restée, pour voir l’apothéose du cinquième acte, le « clou » de l’éruption du Vésuve, pour lequel, à l’époque des féeries romantiques les plus échevelées, La Muette est restée plus célèbre encore que pour son rôle-titre muet… Trois fois hélas ! Cela ressemblait à une dérision d’Indes galantes : pas de Vésuve, mais un escalier qui transforme finalement Fenella en madone inca, dorure en sus. Elle aurait mieux fait de se jeter dans le volcan en fureur, comme le livret le lui prescrivait en 1828…
La Muette de Portici (Fenella-Elena Borgogni) DR E. Carecchio (c) Opéra Comique
J’oubliais le fil rouge ! Le rouleau… La mise en scène trouve en effet sa cohérence dans un motif de longues bandes de toile, alternativement filet de pêcheur, vagues sur la mer, et foulard du séducteur dans lequel se drape l’héroïne abandonnée. Une héroïne qui danse puisqu’elle ne peut parler, mais qui se démène davantage comme la sorcière de Mary Wigman que comme la gentille fille fragile qu’elle est censée représenter, et qui finit convulsivement entortillée dans le rouleau comme la mouche dans la toile de l’araignée au terme de sa danse de saint Guy.
Heureux donc les Bruxellois, privés d’opéra pour cause de délicatesse politique : ils n’auront pas à souffrir cette gabegie !
Compte rendu par Noémie Courtès
Paris, Opéra comique, les 5, 7, 9, 11, 13 et 15 avril 2012.
Documents en ligne sur le site de l’Opéra comique (dont une vidéo où on devine l’attaque de typhus) : http://www.opera-comique.com/spectacle/la-muette-de-portici/
Voir aussi le numéro 265 de L’Avant-Scène Opéra.
Heureux donc les Bruxellois, privés d’opéra pour cause de délicatesse politique : ils n’auront pas à souffrir cette gabegie !
Compte rendu par Noémie Courtès
Paris, Opéra comique, les 5, 7, 9, 11, 13 et 15 avril 2012.
Documents en ligne sur le site de l’Opéra comique (dont une vidéo où on devine l’attaque de typhus) : http://www.opera-comique.com/spectacle/la-muette-de-portici/
Voir aussi le numéro 265 de L’Avant-Scène Opéra.
La Muette de Portici (Fenella -Elena Borgogni) DR E. Carecchio (c) Opéra Comique