Résumé
Avant sa disparition en juin 2013, le Professeur Armindo Biao (co-fondateur de l’ethnoscénologie, Université Fédérale de Bahia) avait entrepris un projet de recherche sur les fondements de l’imaginaire érotique dans les arts du spectacle vivant auquel étaient associé(e)s les jeunes chercheur(e)s du réseau-ethnoscénologie et de la Société Française d’Ethnoscénologie. Les journées d’étude des 23 et 24 octobre 2014 sont l’occasion de lui rendre hommage.
Alors que de nombreux travaux portent sur les origines rituelles du spectacle vivant, ses fondements érotiques restent le plus souvent ignorés ou sous-estimés. Quels sont les fondements qui dans toutes les sociétés associent le spectacle vivant à l’érotisme et à la sexualité aussi bien qu’au politique et aux croyances ? Comment les analyser dans les perspectives de l’ethnoscénologie ?
Alors que de nombreux travaux portent sur les origines rituelles du spectacle vivant, ses fondements érotiques restent le plus souvent ignorés ou sous-estimés. Quels sont les fondements qui dans toutes les sociétés associent le spectacle vivant à l’érotisme et à la sexualité aussi bien qu’au politique et aux croyances ? Comment les analyser dans les perspectives de l’ethnoscénologie ?
Argumentaire
Longtemps ignoré par les historiens du théâtre, cette thématique est aujourd’hui prise en considération dans le mouvement de renouveau de l’historiographie théâtrale et l’ethnoscénologie. Les théories du théâtre constituent en elles-mêmes des objets anthropologiques. C’est ainsi qu’ont dominé en Europe une vision le plus souvent littéraire, philosophique et intellectualiste des arts du spectacle vivant, aux dépens de l’analyse des modalités de leur mise en œuvre. L’idée d’un théâtre essentiellement textuel et respectable s’est construite depuis la Renaissance.
Partant de ce constat que dans toutes les sociétés humaines la sexualité et l’érotisme sont présents dès l’origine même du spectacle vivant, et se retrouvent aujourd’hui sous diverses formes, comment peut-on analyser cette situation à partir des trois notions clés de l’ethnoscénologie :
- La spectacularité, ou ce qui se passe dans la tête de celui regarde (J. Grotowski),
- La performativité, ou ce qui relève de l’ordre des conduites et des comportements de la personne qui vit le phénomène (R. Schechner),
- Le rapport symbiotique, ou ce qui est de l’ordre de la relation.
Les historiens, les anthropologues et les psychanalystes s’accordent pour constater que dans toutes les sociétés humaines le regard et les interactions visuelles sont très contrôlées. Ils jouent de plus un rôle majeur dans la vie sociale - les rapports hiérarchiques -, et le choix des partenaires sexuels. Les éthologistes ont mis en évidence l’importance de l’apparence – qualités physiques, état des caractères sexuels secondaires, « beauté » des plumages et de la fourrure. Au moment de la pariade, les mâles adoptent des comportements spectaculaires, - chants mélodieux, danses -, de telle sorte que les femelles reconnaissent et choisissent les meilleurs géniteurs. De tout temps, ont existé des spectacles dans lesquels femmes et hommes se donnaient à voir comme objets sexuels. Si l’appétence sexuelle est une donnée biologique, un universel de l’espèce animale, l’érotisme est une variable aléatoire, une notion socialement, culturellement, définie. L’aisthésis est dans l’espèce humaine le moyen de transcender sa fatalité biologique. Tout art étant à la fois multifactoriel et multisensoriel, même si l’on dénote la prééminence d’un sens ou d’une instance biologique, le fatum biologique transformé en art implique l’ensemble de la sensorialité et par conséquent l’esthétique, au sens de plaisir né de la perception de la beauté.
L’érotisme n’ayant pas été considéré comme un art, mais comme une conduite privée, il n’est pas explicitement enseigné, sinon dans certaines micro-sociétés, par exemple dans les écoles de Môhiniyâttam (Mathou, 2011). L’absence d’éducation à l’érotisme conduirait-elle à une société désolidarisée, discordante, barbare où la drogue compenserait la carence orgasmique ? (Andrieu, 2013) Sur le plan biologique, la générosité, et par conséquent l’altruisme, est une fonction fondamentale dans l’espèce humaine. L’amour altruiste produirait plus d’anticorps que l’amour consommation. L’absence d’altruisme, y compris dans la sexualité, fait qu’un même objet perd de sa valeur. L’amour consommation, à l’image de l’hyper-production, et la sensorialité/sensualité sont antinomiques. Si la sexualité relève du fatum biologique nécessaire à la reproduction, l’érotisme en est la maîtrise, son éducation, un élément nécessaire à l’humanisation.
Les théoriciens européens du théâtre ont généralement négligé cette dimension historique et anthropologique au profit d’une théorie ritualiste et liturgique de l’origine du théâtre. À la différence des légendes qui, dans d’autres cultures, attribuent la naissance du théâtre au plaisir éprouvé par les dieux devant la nudité d’une danseuse (No du Japon), les contes salaces ou merveilleux, les mimes zoomorphes ou érotiques, les épopées chantant l’amour. Il est intéressant de noter que l’attribution des rôles féminins à de jeunes garçons est venue de la décision de faire cesser l’excitation érotique des spectateurs qui prenaient plaisir aux extravagances lascives des actrices-danseuses. Par exemple, au Japon, les origines du No sont moins le rituel que le strip-tease d’une nonne devant les dieux ; les moniales interprètes du Kabuki joueront des scènes érotiques explicites qui auront tellement de succès que les femmes seront remplacées par des hommes. De même, dans l’histoire du théâtre élisabéthain est souvent ignorée l’influence du travestissement des garçons (play boy) en femmes dans l’engouement pour la construction d’une culture de l’homosexualité. Toute forme d’art n’exerce-t-elle pas une séduction sur le public et exprime le désir sexuel (Ogai, 1909) ?
Du point de vue historique, au XVIIe siècle, en France, la condamnation du théâtre a été argumentée à partir d’éléments de morale sexuelle. Bossuet évoque dans sa lettre du 9 mai 1664, au Père Caffaro, le théâtre comme lieu de concupiscence de la chair, concupiscence des yeux, où tout est sensualité, curiosité, ostentation, orgueil et plaisir ! En développant l’idée que les comédiennes s’offrent en esclave devant la concupiscence des hommes, Bossuet démontre une des sources éthologique du spectacle vivant : la pulsion scopique ! Le Rituel de Toulon (1780) réédité jusqu’à la fin du XIXe siècle explicite comment se rendre au théâtre conduit au péché mortel (Pradier, 2005). Condamné par l’Église, le théâtre n’en continu pas moins de se sexualiser. Si les ouvrages de morale condamnent le spectacle vivant en raison de la dépravation des mœurs, des pièces à l’image de Phèdre, implicitement érotiques, sont transformées en pièces purement littéraires où le texte est premier par rapport à ce que dit le corps… si bien que dans le jeu des acteurs Phèdre est souvent présentée comme une hystérique, femme sexuellement exaltée. Afin de correspondre au programme de littérature dans les collèges et lycées, la dimension érotique du théâtre classique se trouve effacée.
L’exotisme dans les arts et les lettres a permis de développer une érotique de la scène. Bougainville évoque les chants et la danse qui en Océanie sont toujours accompagnées de postures lascives qui rappellent à chaque instant les douceurs de l’amour : « tout crie de s’y livrer » (Bougainville, 1771, p.213). Diderot montre comment les « Tahitiens, abusés par les cruels Spartiates en jaquette noire que sont les missionnaires, apportent les éléments d’une érotique fondée sur le respect de l’énergie vitale » (Pradier, 1997, p.303). Les sauvages, selon l’opinion commune, ne seraient pas touchés par la question de la pudeur (Duerr, 1988). Ce sera le choc des missions en Afrique où la nudité devient moment d’exhibition. Les villages noirs et les zoos humains (Garrigues et Lévy, 2003), de grandes expositions ethnographiques et coloniales, la diffusion de nouvelles danses exotiques (Décoret-Ahiha, 2004), alimentent le rêve d’une sexualité libérée. Littérateurs, artistes et esthètes migrent vers Monte Verita (Colomer, 1996 ; Noschis, 2011) et d’autres communautés artistiques, anarchistes, hygiénistes, végétariennes, naturistes, libres et nues, où peuvent s’inventer d’autres modalités de « créer ensemble » (Autant-Mathieu, 2013). Alors que Berlin devient la République du Strip-tease (Gordon, 2000), Margaret Mead décrit dans Mœurs et Sexualité en Océanie (1928) « une sexualité libre et heureuse : garçons et filles peuvent nouer plusieurs relations à la fois ou pratiquer l’homosexualité, et tout cela est accepté par la société samoane » (Meyran, 2003).
L’anthropologue américaine n’imagine-t-elle pas là une société qui serait le contrepoison du puritanisme ?
La recherche d’une esthétique érotique s’épanouit à la Belle-Époque, alors que le peintre Paul Gauguin s’éteint en 1903 après avoir vécu le rêve du bon sauvage à la compagne vêtue d’une robe diaphane qui ne cache en rien sa nudité (Segalen, 1907). La danseuse américaine Isadora Duncan fait figure d’indépendance absolue en dansant pieds nus pour les hommes du monde : « Si mon art devait être symbolique de quelque chose, ce serait de la liberté de la femme et de son émancipation vis-à-vis des préjugés qui sont la lice et la trame du puritanisme […]. La nudité est authentique, c’est de la beauté, c’est de l’art […]. Mon corps est le temple de mon art » (Duncan, 1922, p.104). Le culturiste Edmond Desbonnet multiplie les clichés photographiques de ses clients, hommes et femmes, mais pour la plupart de forts grands moustachus qui contribuent à l’industrie culturelle pornographique gay (Sn., 1993). Traduisant ses influences orientales dans le monde de la mode, le couturier Paul Poiret est le premier à proposer de libérer le corps de la femme avec la robe qui se porte sans corset (Vigarello, 2007). La plupart des actrices font alors profession de demi-mondaine, au tel point que dans certaines langues, comme au Liban, le mot « actrice » est devenu synonyme de prostituée. Venue au théâtre après s’être plus ou moins prostituée, collectionnant les amants célèbres parmi lesquels Gustave Doré, Jean Richepin, Jean Lorrain, Catulle Mendès, mais aussi Louise Abbéma, la comédienne Sara Bernhardt devient la tragédienne la plus célèbre de l’époque, acclamée, portée en triomphe et comblée d’honneurs. Joséphine Baker, ses bananes, ses plumes et ses roulements d’yeux se découvrent dans les music-halls de Paris en 1925, devenant un mythe pour ses spectateurs (Perault, 2007). Colette après s’être illustrée dans quelques mimodrames érotiques, devient la première femme élue à l’Académie Goncourt en 1945 qu’elle présidera en 1949. Et que dire des scènes érotiques médicalisées, celles par exemple de la Salpêtrière où s’exerce le voyeurisme scientifique de Charcot ? (Gordon, 2013)
Elaboré à partir de la notion de performance (Biet et Roques, 2013), ce qu’on appelle le performatif est au cœur de l’humanitude. Il se retrouve dans toutes les instances de la vie individuelle et sociale. Or, il apparaît que le spectacle vivant constitue des sortes de maquettes anthropologiques des sociétés, en ce qu’il représente ce que l’on pourrait appeler des fondamentaux culturels : « le théâtre est une maquette anthropologique du rapport des sexes, où entre en jeu biologie et sexualité, modèles de société et bonnes mœurs » (Pradier, 2000).
Partant de ce constat que dans toutes les sociétés humaines la sexualité et l’érotisme sont présents dès l’origine même du spectacle vivant, et se retrouvent aujourd’hui sous diverses formes, comment peut-on analyser cette situation à partir des trois notions clés de l’ethnoscénologie :
- La spectacularité, ou ce qui se passe dans la tête de celui regarde (J. Grotowski),
- La performativité, ou ce qui relève de l’ordre des conduites et des comportements de la personne qui vit le phénomène (R. Schechner),
- Le rapport symbiotique, ou ce qui est de l’ordre de la relation.
Les historiens, les anthropologues et les psychanalystes s’accordent pour constater que dans toutes les sociétés humaines le regard et les interactions visuelles sont très contrôlées. Ils jouent de plus un rôle majeur dans la vie sociale - les rapports hiérarchiques -, et le choix des partenaires sexuels. Les éthologistes ont mis en évidence l’importance de l’apparence – qualités physiques, état des caractères sexuels secondaires, « beauté » des plumages et de la fourrure. Au moment de la pariade, les mâles adoptent des comportements spectaculaires, - chants mélodieux, danses -, de telle sorte que les femelles reconnaissent et choisissent les meilleurs géniteurs. De tout temps, ont existé des spectacles dans lesquels femmes et hommes se donnaient à voir comme objets sexuels. Si l’appétence sexuelle est une donnée biologique, un universel de l’espèce animale, l’érotisme est une variable aléatoire, une notion socialement, culturellement, définie. L’aisthésis est dans l’espèce humaine le moyen de transcender sa fatalité biologique. Tout art étant à la fois multifactoriel et multisensoriel, même si l’on dénote la prééminence d’un sens ou d’une instance biologique, le fatum biologique transformé en art implique l’ensemble de la sensorialité et par conséquent l’esthétique, au sens de plaisir né de la perception de la beauté.
L’érotisme n’ayant pas été considéré comme un art, mais comme une conduite privée, il n’est pas explicitement enseigné, sinon dans certaines micro-sociétés, par exemple dans les écoles de Môhiniyâttam (Mathou, 2011). L’absence d’éducation à l’érotisme conduirait-elle à une société désolidarisée, discordante, barbare où la drogue compenserait la carence orgasmique ? (Andrieu, 2013) Sur le plan biologique, la générosité, et par conséquent l’altruisme, est une fonction fondamentale dans l’espèce humaine. L’amour altruiste produirait plus d’anticorps que l’amour consommation. L’absence d’altruisme, y compris dans la sexualité, fait qu’un même objet perd de sa valeur. L’amour consommation, à l’image de l’hyper-production, et la sensorialité/sensualité sont antinomiques. Si la sexualité relève du fatum biologique nécessaire à la reproduction, l’érotisme en est la maîtrise, son éducation, un élément nécessaire à l’humanisation.
Les théoriciens européens du théâtre ont généralement négligé cette dimension historique et anthropologique au profit d’une théorie ritualiste et liturgique de l’origine du théâtre. À la différence des légendes qui, dans d’autres cultures, attribuent la naissance du théâtre au plaisir éprouvé par les dieux devant la nudité d’une danseuse (No du Japon), les contes salaces ou merveilleux, les mimes zoomorphes ou érotiques, les épopées chantant l’amour. Il est intéressant de noter que l’attribution des rôles féminins à de jeunes garçons est venue de la décision de faire cesser l’excitation érotique des spectateurs qui prenaient plaisir aux extravagances lascives des actrices-danseuses. Par exemple, au Japon, les origines du No sont moins le rituel que le strip-tease d’une nonne devant les dieux ; les moniales interprètes du Kabuki joueront des scènes érotiques explicites qui auront tellement de succès que les femmes seront remplacées par des hommes. De même, dans l’histoire du théâtre élisabéthain est souvent ignorée l’influence du travestissement des garçons (play boy) en femmes dans l’engouement pour la construction d’une culture de l’homosexualité. Toute forme d’art n’exerce-t-elle pas une séduction sur le public et exprime le désir sexuel (Ogai, 1909) ?
Du point de vue historique, au XVIIe siècle, en France, la condamnation du théâtre a été argumentée à partir d’éléments de morale sexuelle. Bossuet évoque dans sa lettre du 9 mai 1664, au Père Caffaro, le théâtre comme lieu de concupiscence de la chair, concupiscence des yeux, où tout est sensualité, curiosité, ostentation, orgueil et plaisir ! En développant l’idée que les comédiennes s’offrent en esclave devant la concupiscence des hommes, Bossuet démontre une des sources éthologique du spectacle vivant : la pulsion scopique ! Le Rituel de Toulon (1780) réédité jusqu’à la fin du XIXe siècle explicite comment se rendre au théâtre conduit au péché mortel (Pradier, 2005). Condamné par l’Église, le théâtre n’en continu pas moins de se sexualiser. Si les ouvrages de morale condamnent le spectacle vivant en raison de la dépravation des mœurs, des pièces à l’image de Phèdre, implicitement érotiques, sont transformées en pièces purement littéraires où le texte est premier par rapport à ce que dit le corps… si bien que dans le jeu des acteurs Phèdre est souvent présentée comme une hystérique, femme sexuellement exaltée. Afin de correspondre au programme de littérature dans les collèges et lycées, la dimension érotique du théâtre classique se trouve effacée.
L’exotisme dans les arts et les lettres a permis de développer une érotique de la scène. Bougainville évoque les chants et la danse qui en Océanie sont toujours accompagnées de postures lascives qui rappellent à chaque instant les douceurs de l’amour : « tout crie de s’y livrer » (Bougainville, 1771, p.213). Diderot montre comment les « Tahitiens, abusés par les cruels Spartiates en jaquette noire que sont les missionnaires, apportent les éléments d’une érotique fondée sur le respect de l’énergie vitale » (Pradier, 1997, p.303). Les sauvages, selon l’opinion commune, ne seraient pas touchés par la question de la pudeur (Duerr, 1988). Ce sera le choc des missions en Afrique où la nudité devient moment d’exhibition. Les villages noirs et les zoos humains (Garrigues et Lévy, 2003), de grandes expositions ethnographiques et coloniales, la diffusion de nouvelles danses exotiques (Décoret-Ahiha, 2004), alimentent le rêve d’une sexualité libérée. Littérateurs, artistes et esthètes migrent vers Monte Verita (Colomer, 1996 ; Noschis, 2011) et d’autres communautés artistiques, anarchistes, hygiénistes, végétariennes, naturistes, libres et nues, où peuvent s’inventer d’autres modalités de « créer ensemble » (Autant-Mathieu, 2013). Alors que Berlin devient la République du Strip-tease (Gordon, 2000), Margaret Mead décrit dans Mœurs et Sexualité en Océanie (1928) « une sexualité libre et heureuse : garçons et filles peuvent nouer plusieurs relations à la fois ou pratiquer l’homosexualité, et tout cela est accepté par la société samoane » (Meyran, 2003).
L’anthropologue américaine n’imagine-t-elle pas là une société qui serait le contrepoison du puritanisme ?
La recherche d’une esthétique érotique s’épanouit à la Belle-Époque, alors que le peintre Paul Gauguin s’éteint en 1903 après avoir vécu le rêve du bon sauvage à la compagne vêtue d’une robe diaphane qui ne cache en rien sa nudité (Segalen, 1907). La danseuse américaine Isadora Duncan fait figure d’indépendance absolue en dansant pieds nus pour les hommes du monde : « Si mon art devait être symbolique de quelque chose, ce serait de la liberté de la femme et de son émancipation vis-à-vis des préjugés qui sont la lice et la trame du puritanisme […]. La nudité est authentique, c’est de la beauté, c’est de l’art […]. Mon corps est le temple de mon art » (Duncan, 1922, p.104). Le culturiste Edmond Desbonnet multiplie les clichés photographiques de ses clients, hommes et femmes, mais pour la plupart de forts grands moustachus qui contribuent à l’industrie culturelle pornographique gay (Sn., 1993). Traduisant ses influences orientales dans le monde de la mode, le couturier Paul Poiret est le premier à proposer de libérer le corps de la femme avec la robe qui se porte sans corset (Vigarello, 2007). La plupart des actrices font alors profession de demi-mondaine, au tel point que dans certaines langues, comme au Liban, le mot « actrice » est devenu synonyme de prostituée. Venue au théâtre après s’être plus ou moins prostituée, collectionnant les amants célèbres parmi lesquels Gustave Doré, Jean Richepin, Jean Lorrain, Catulle Mendès, mais aussi Louise Abbéma, la comédienne Sara Bernhardt devient la tragédienne la plus célèbre de l’époque, acclamée, portée en triomphe et comblée d’honneurs. Joséphine Baker, ses bananes, ses plumes et ses roulements d’yeux se découvrent dans les music-halls de Paris en 1925, devenant un mythe pour ses spectateurs (Perault, 2007). Colette après s’être illustrée dans quelques mimodrames érotiques, devient la première femme élue à l’Académie Goncourt en 1945 qu’elle présidera en 1949. Et que dire des scènes érotiques médicalisées, celles par exemple de la Salpêtrière où s’exerce le voyeurisme scientifique de Charcot ? (Gordon, 2013)
Elaboré à partir de la notion de performance (Biet et Roques, 2013), ce qu’on appelle le performatif est au cœur de l’humanitude. Il se retrouve dans toutes les instances de la vie individuelle et sociale. Or, il apparaît que le spectacle vivant constitue des sortes de maquettes anthropologiques des sociétés, en ce qu’il représente ce que l’on pourrait appeler des fondamentaux culturels : « le théâtre est une maquette anthropologique du rapport des sexes, où entre en jeu biologie et sexualité, modèles de société et bonnes mœurs » (Pradier, 2000).
Bibliographie
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- G. Vigarello. Vogue en beauté (1920-2007). Paris : Ramsay, 2007.
- A. Walter. Érotique du Japon classique. Paris : Gallimard, 1994.
Mots clés : Corps, érotisme, sexualité, arts du spectacle vivant, ethnoscénologie.
- B. Andrieu. La peur de l’orgasme. Paris : Le Murmure, 2013.
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- K. Noschis. Monte Verità. Ascona et le génie du lieu. « Le savoir Suisse », Presses Polytechniques et Universitaires Romandes, 2011.
- M. Ogai. Vita sexualis ou l’apprentissage amoureux du professeur Kanai Shizuka. Traduit du japonais pas Amina Okada. Paris : « Connaissance de l’Orient », Gallimard, 1988 (1909).
- S. Perault. « Danseuse(s) noire(s) : analyse et permanence d’un stéréotype au music-hall ». In : Gilles Boetsch, Hélène Claudot (dir). Corps/revue interdisciplinaire, n°3. Paris : Éditions Dilecta, 2007, p.65-72.
- J.-M. Pradier. « Flesh is spirit. Ritual or the Problem of Action ». In Bent Holm/Bent Flemming Nielsen/Karen Vedel (eds.). Religion, Ritual, Theatre. Frankfurt : Peter Lang GMBH Internationaler Verlag der Wissenschaften, 2008, p.205-228.
- J.-M. Pradier. « Le rituel de Toulon et le péché de Comédie ». In Jean-Marie Thomasseau (textes réunis par), Le Théâtre au plus près : pour André Veinstein. Saint-Denis : Presses Universitaires de Vincennes, 2005.
- J.-M. Pradier. « Las caricias del ojo, las escenas de eros ». In Teatro XXI, Revista del Getea, Año IX, n°17. Buenos Aires : Universidad de Buenos Aires, Faculta de Filosofia y Letras, 2003, p.1-16.
- J.-M. Pradier. La Scène et la fabrique des corps. Ethnoscénologie du spectacle vivant en Occident (Ve siècle av.J.-C. – XVIIIe siècle). Bordeaux : Presses Universitaires de Bordeaux, 2000 (1997).
- J.-M. Pradier. « Le corps de Phèdre. L’œil ou la peau ? ». In Théârtre, n°2. Paris : « Arts 8 », L’Harmattan, 1999, p.61-74.
- J.-M. Pradier. « La chair du péché ». In Internationale de l’Imaginaire, nouvelle série, n°8. Paris : Actes-Sud/Babel, Maison des Culture du Monde, 1998, p.13-25.
- J.-M. Pradier. « La scène des sens ou les voluptés du vivant ». In Internationale de l’Imaginaire, nouvelle série, n°2. Paris : Actes-Sud/Babel, Maison des Culture du Monde, 1994, p.13-22.
- J.-M. Pradier. « Les corps séducteurs ». In Théâtre/Public, n°96. Saint-Denis, Novembre-décembre 1990, p.4-8.
- J.-M. Pradier. « Toward a Biological Theory of the Body in Performance ». In New Theatre Quaterly. Vol. VI. Cambridge University Press, February 1990, p.86-98.
- V. Segalen. Essai sur l’exotisme, une esthétique du divers et Textes sur Gauguin et l’Océanie précédé de Segalen et l’exotisme par Gilles Manceron. Paris : Fata Morgana, 1986 (1907).
- C. Taraud. La prostitution coloniale. Algérie, Tunisie, Maroc (1830-1962). Paris : Payot, 2003.
- P. Verrièle. La Muse de mauvaise réputation. Danse et érotisme. Paris : « L’Attrape-corps », La Musardine, 2006.
- G. Vigarello. Vogue en beauté (1920-2007). Paris : Ramsay, 2007.
- A. Walter. Érotique du Japon classique. Paris : Gallimard, 1994.
Mots clés : Corps, érotisme, sexualité, arts du spectacle vivant, ethnoscénologie.
Modalités de participation
La participation aux journées des jeunes chercheur(e)s en ethnoscénologie est ouverte aux doctorant(e)s et chercheur(e)s dont les travaux abordent l’érotisme et la sexualité dans les arts du spectacle vivant et dans le monde des sports quelle que soit leur discipline et leur perspective scientifique (anthropologie modale, histoire du corps, écologie corporelle, soma-esthétique, somatechnie, sciences cognitives, etc…). Dans la mesure du possible, une place sera faite aux artistes et professionnels des arts du spectacle vivant.
Modalités de sélection
La périodisation et le champ géographique ne sont pas délimités.
Une attention particulière sera portée aux recherches sur les malentendus culturels et les incarnations de l’imaginaire (idéologies laïques ou religieuses : croyances, sagesses, etc. et savantes : médecines, sciences, etc.), ainsi que les thèmes relatifs aux handicaps, aux scènes de la culture LGBT et de la postpornographie. Les travaux sur les archives et les traductions seront privilégiés.
Les résumés analytiques (500 mots max.) exposeront une problématique (son actualité, sa pertinence), des sources (nature et originalité), la méthodologie (description ethnographique, analyse descriptive, observation participante, etc.), les résultats, les références bibliographiques (5 max.) et 5 mots clés permettant de caractériser la communication. La structure, la logique et la clarté des résumés seront appréciées. Les résumés seront rédigés en police times 12, interligne simple. Le titre sera placé en haut à droite. Les nom(s), prénom(s) et institutions de rattachement apparaîtront sous le titre à droite. Le document portera votre nom sous la forme « initiale du prénomnom_resume.docx » (exemple : PForigua_resume.docx).
Les notices biographiques (200 mots max.) renseigneront sur l’auteur(e), son affiliation institutionnelle (laboratoire, équipe d’accueil, université, unité de recherche), ses fonctions et son activité scientifique et éventuellement artistique. Le document portera votre nom sous la forme « initiale du prénomnom_resume.docx » (exemple : PForigua_bio.docx).
Les communications affichées (Posters) sont acceptées. Les posters seront affichés pendant toute la durée des journées, mais un temps sera consacré spécifiquement à la discussion autour des Posters. Les Posters devront présenter un projet de recherche en cours de réalisation ou déjà achevé.
Les documents : résumé et notice biographique sont à envoyer avant le 18 mai 2014 aux deux adresses : Charlotte Ricci : cricci@etud.univ-paris8.fr et Pierre Philippe-Meden : pierre.philippe-meden@mshparisnord.fr.
Réponses aux propositions de communication début juin 2014.
Une attention particulière sera portée aux recherches sur les malentendus culturels et les incarnations de l’imaginaire (idéologies laïques ou religieuses : croyances, sagesses, etc. et savantes : médecines, sciences, etc.), ainsi que les thèmes relatifs aux handicaps, aux scènes de la culture LGBT et de la postpornographie. Les travaux sur les archives et les traductions seront privilégiés.
Les résumés analytiques (500 mots max.) exposeront une problématique (son actualité, sa pertinence), des sources (nature et originalité), la méthodologie (description ethnographique, analyse descriptive, observation participante, etc.), les résultats, les références bibliographiques (5 max.) et 5 mots clés permettant de caractériser la communication. La structure, la logique et la clarté des résumés seront appréciées. Les résumés seront rédigés en police times 12, interligne simple. Le titre sera placé en haut à droite. Les nom(s), prénom(s) et institutions de rattachement apparaîtront sous le titre à droite. Le document portera votre nom sous la forme « initiale du prénomnom_resume.docx » (exemple : PForigua_resume.docx).
Les notices biographiques (200 mots max.) renseigneront sur l’auteur(e), son affiliation institutionnelle (laboratoire, équipe d’accueil, université, unité de recherche), ses fonctions et son activité scientifique et éventuellement artistique. Le document portera votre nom sous la forme « initiale du prénomnom_resume.docx » (exemple : PForigua_bio.docx).
Les communications affichées (Posters) sont acceptées. Les posters seront affichés pendant toute la durée des journées, mais un temps sera consacré spécifiquement à la discussion autour des Posters. Les Posters devront présenter un projet de recherche en cours de réalisation ou déjà achevé.
Les documents : résumé et notice biographique sont à envoyer avant le 18 mai 2014 aux deux adresses : Charlotte Ricci : cricci@etud.univ-paris8.fr et Pierre Philippe-Meden : pierre.philippe-meden@mshparisnord.fr.
Réponses aux propositions de communication début juin 2014.
Informations diverses :
Langues : Les interventions en français (de préférence) sont d’une durée de vingt minutes (max.). Les interventions en chinois, portugais, espagnol, anglais ou italien, devront être accompagnées d’une traduction en français qui sera distribuée aux participant(e)s, et d’un support PowerPoint également traduit en français.
Inscriptions-restaurations : L’inscription aux journées est gratuite. Les transports et logements ne sont pas pris en charge. Les frais pour le déjeuner sur place sont de 10€/repas.
Certificat de participation : Les communicants recevront un certificat de participation disponible à la fin de la deuxième journée.
Responsables scientifiques :
Paul Forigua (doctorant en études théâtrales, Paris 8, MSH-Paris Nord) ; Pierre Philippe-Meden (ethnoscénologue, Paris 8, MSH-Paris Nord).
Comité d’organisation :
Hyun-Joo Lee (ethnoscénologue, Paris 8, MSH-Paris Nord) ; Shi-Lung Lo (historien, maître de langue en chinois, Paris 7) ; Éléonore Martin (doctorante en études théâtrales, ATER en études chinoises, La Rochelle) ; Corinne Mathou (doctorante en études théâtrales, Paris 8, Professeur de Môhiniyâttam, International School of Bangalore) ; Charlotte Ricci (doctorante en études théâtrales, Paris 8, MSH-Paris Nord), Vanille Roche-Fogli (doctorante en études théâtrales, Paris 3).
Comité scientifique :
Bernard Andrieu (Pr. Nancy), Vincent Durand-Dastès (Pr. INALCO), Jean-François Dusigne (Pr. Paris 8), Amos Fergombe (Pr. Artois), Nathalie Gauthard (MCF Nice), Sylvie Perault (ethnologue, CEPCOS, Paris 3, Paris 8, ENSATT), Véronique Perruchon (MCF Lille 3), Martial Poirson (Pr. Grenoble 3), Jean-Marie Pradier (Pr. Paris 8), Eve-Marie Rollinat-Levasseur (MCF Paris 3), Christelle Taraud (enseignante dans les programmes parisiens de Columbia University, Vassar and Wesleyan College et NYU).
Lieu : Maison des Sciences de l’Homme Paris Nord (USR3258) : http://www.mshparisnord.fr
Langues : Les interventions en français (de préférence) sont d’une durée de vingt minutes (max.). Les interventions en chinois, portugais, espagnol, anglais ou italien, devront être accompagnées d’une traduction en français qui sera distribuée aux participant(e)s, et d’un support PowerPoint également traduit en français.
Inscriptions-restaurations : L’inscription aux journées est gratuite. Les transports et logements ne sont pas pris en charge. Les frais pour le déjeuner sur place sont de 10€/repas.
Certificat de participation : Les communicants recevront un certificat de participation disponible à la fin de la deuxième journée.
Responsables scientifiques :
Paul Forigua (doctorant en études théâtrales, Paris 8, MSH-Paris Nord) ; Pierre Philippe-Meden (ethnoscénologue, Paris 8, MSH-Paris Nord).
Comité d’organisation :
Hyun-Joo Lee (ethnoscénologue, Paris 8, MSH-Paris Nord) ; Shi-Lung Lo (historien, maître de langue en chinois, Paris 7) ; Éléonore Martin (doctorante en études théâtrales, ATER en études chinoises, La Rochelle) ; Corinne Mathou (doctorante en études théâtrales, Paris 8, Professeur de Môhiniyâttam, International School of Bangalore) ; Charlotte Ricci (doctorante en études théâtrales, Paris 8, MSH-Paris Nord), Vanille Roche-Fogli (doctorante en études théâtrales, Paris 3).
Comité scientifique :
Bernard Andrieu (Pr. Nancy), Vincent Durand-Dastès (Pr. INALCO), Jean-François Dusigne (Pr. Paris 8), Amos Fergombe (Pr. Artois), Nathalie Gauthard (MCF Nice), Sylvie Perault (ethnologue, CEPCOS, Paris 3, Paris 8, ENSATT), Véronique Perruchon (MCF Lille 3), Martial Poirson (Pr. Grenoble 3), Jean-Marie Pradier (Pr. Paris 8), Eve-Marie Rollinat-Levasseur (MCF Paris 3), Christelle Taraud (enseignante dans les programmes parisiens de Columbia University, Vassar and Wesleyan College et NYU).
Lieu : Maison des Sciences de l’Homme Paris Nord (USR3258) : http://www.mshparisnord.fr